SCÈNE IV. — ANTÉRASTILE, ADELPHASIE, AGORASTOCLÈS, HANNON.
ANTÉRASTILE. Cela valait le prix pour un amateur de jolies choses de venir au temple régaler ses yeux d’un si brillant spectacle. J’ai été ravie des charmantes offrandes des courtisanes, beaux présents dignes de la reine de beauté. J’ai admiré aussi la puissance de la déesse : tant de gracieuses choses, et toutes si merveilleusement arrangées, chacune à sa place ! Partout on était embaumé par la myrrhe et les parfums d’Arabie ; ni ta fête ni ton temple, ô Vénus, n’avaient l’air d’être négligés : tant il se pressait là de clientes pour rendre hommage à Vénus Calydonienne. Quant à nous deux, ma sœur, nous avons été là comme des reines, belles, respectées, et les jeunes gens ne se sont pas moqués de nous comme de toutes les autres filles.
ADELPHASIE. J’aimerais mieux que ce fût l’avis d’autres, ma sœur, et que tu ne fisses pas toi-même ton panégyrique.
ANTÉRASTILE. Je l’espère bien.
ADELPHASIE. Et moi aussi, par Pollux, quand je compare notre caractère à celui des autres femmes. Notre naissance exige de nous que nous restions pures de toute faute.
HANNON, à part. O Jupiter, qui protéges et nourris le genre humain, toi qui donnes pour nous du prix à la vie, toi de qui dépendent les espérances de tous les hommes, fais, je te conjure, que cette journée soit heureuse pour mon destin. Ces filles dont j’ai été sevré tant d’années, et qui toutes petites ont été enlevées à leur pays, rends-leur la liberté, et je saurai qu'une constante piété a sa récompense.
AGORASTOCLÈS. J’obtiendrai tout de Jupiter : il m’a des obligations et il a peur de moi.
HANNON. Tais-toi, je te prie.
AGORASTOCLÈS. Ne pleurez pas, mon oncle.
ANTÉRASTILE. Qu’il est doux, ma sœur, de triompher comme nous avons fait aujourd’hui, distinguées entre toutes par nos attraits !
ADELPHASIE. Tu es plus folle que je ne voudrais, ma pauvre sœur. Te trouves-tu donc si belle parce que là-bas ou ne. t’a pas barbouillé le visage de suie ?
AGORASTOCLÈS. O mon oncle, le plus cher, le meilleur des oncles !