Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/383

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ANTIPHON. Si elles aiment mieux rester ici que de prendre d’autres maris, à leur aise : qu’ai-je besoin, sur la fin de mes jours, de leur faire la guerre ? surtout quand il me semble qu’elles n’ont rien fait pour cela. Non ! pas de querelles ! Mais voici, je pense, ce que j’ai de mieux à faire : examinons comment je m’y prendrai tout d’abord, si je les tâterai d’une façon un peu détournée, comme si je n’avais pas de reproches à leur faire, comme si je n’avais rien appris de défavorable sur leur compte ; ou bien si je tâcherai d’en venir à mes fins par la douceur où par la menace. Je sais qu’il y aura des contestations ; je connais mes filles sur le bout du doigt.

PINACIE. Mon avis est de recourir aux prières et non à la rébellion. Si nous réclamons son indulgence, j’espère que nous l’obtiendrons : nous ne pouvons lui tenir tête sans nous déshonorer, sans nous rendre coupables au dernier point. Pour moi, je n’en ferai rien, et je te conseille aussi de n’en rien faire ; prions-le, je connais nos parents, on peut le fléchir.

ANTIPHON. Voici ce que je ferai : j’aurai l’air de les croire coupables. J’userai de ruse, je mettrai l’épouvante dans leurs cœurs ; après cela, je leur découvrirai ma manière de voir. Il y aura bien des mots, je n’en doute pas. Entrons : mais la porte est ouverte.

PINACIE. Assurément, je viens d’entendre la voix de mon père.

PANÉGYRIS. C’est lui, ma foi : allons au-devant de lui et embrassons-le.

PINACIE. Bonjour, mon père.

ANTIPHON. Bonjour, toutes les deux : allons, allons, éloignez-vous.

PINACIE. Un baiser…

ANTIPHON. J’ai assez de vos baisers.

PINACIE. De grâce, mon père, pourquoi cela ?

ANTIPHON. Ils m’engloutissent le cœur.

PINACIE. Asseyez-vous ici, mon père.

ANTIPHON. Je ne m’assiérai point là. Mettez-vous-y, vous ; je prendrai place sur ce banc.

PINACIE. Attendez, un coussin.

ANTIPHON. Vous prenez trop de peine pour moi, je suis bien comme cela.

PINACIE. Laissez, mon père.

ANTIPHON. A quoi bon ?

PINACIE. Il le faut.