Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/39

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LE CUISINIER. Dites donc qu’on la donne. On peut la donner du temps qu’ils se déchargent.

LYSIMAQUE. T’en iras-tu ? cesseras-tu de m’importuner ?

LE CUISINIER. Allons, placez tout cela aux pieds du bonhomme. Je ferai reprendre chez vous toute cette batterie, soit tantôt, soit demain… Suivez-moi. (Il sort.)

LYSIMAQUE. Tu es peut-être étonnée que ce cuisinier soit venu apporter tout cela : je vais te dire ce que c’est.

DORIPPE. Non, je ne suis étonnée ni de vos dépenses ni de vos fredaines. Mais, par Pollux, je ne me résignerai pas à être si mal mariée, et à voir amener chez moi des femmes perdues. Syra, va de ma part prier mon père de venir, et ramène-le avec toi.

SYRA. J’y vais.

LYSIMAQUE. Tu ne sais pas ce que c’est, ma chère femme. Je vais te jurer solennellement que jamais il ne s’est rien passé entre cette fille et moi. Mais Syra est déjà partie ? (Dorippe sort.) Ah ! je suis perdu, celle-ci s’en va à son tour ; je suis bien malheureux ! Et toi, mon voisin, que les dieux et les déesses te confondent avec ta maîtresse et tes amours. Il est cause que je suis en butte aux soupçons les moins mérités ; il me suscite une guerre. Chez moi, une femme irritée. Allons, je vais sur la place raconter tout cela à Démiphon, et lui dire que je jetterai sa créature dans la rue en la traînant par les cheveux, s’il ne l’emmène sur-le-champ hors de chez moi, où bon lui semblera. (S’approchant de la maison.) Ma femme, hé ! ma femme, tu es fâchée contre moi, mais tu ferais bien tout de même de donner ordre qu’on entre ces provisions chez nous : nous en souperons mieux tantôt.


SCÈNE V. — SYRA, EUTYQUE.


SYRA. Le père de ma maîtresse, que j’étais allée chercher, n’est pas chez lui ; on m’a dit qu’il était parti pour la campagne, et je rapporte la nouvelle. Par Castor, la condition des pauvres femmes est dure, et bien loin de valoir celle des hommes. Si un mari prend une maîtresse en cachette, et que sa femme l’apprenne, on ne le punit point. Qu’une femme sorte de la maison sans que son mari le sache, l’époux intente un procès, et on la répudie. Si seulement la loi était la même pour tous ! Une honnête femme se contente d’un seul mari ; pourquoi un mari ne se contenterait-il pas d’une seule femme ?