SCENE II. - GELASIME, PAMPHILIPPE, EPIGNOME.
GÉLASIME, aux spectateurs. Comme je vous disais donc, une fois parti d’ici, j’ai tenu conseil avec mes amis et mes parents ; ils m’ont engagé à me faire périr de faim aujourd’hui. Mais n’aperçois-je pas Pamphilippe avec son frère Épignome ? C’est lui. Abordons-le. O Pamphilippe si désiré, ô mon espoir, ô ma vie, ô mon bonheur, salut ! Je suis joyeux de vous voir de retour en bonne santé dans votre patrie.
PAMPHILIPPE. Bonjour, Gélasime.
GÉLASIME. Vous vous êtes toujours bien porté ?
PAMPHILIPPE. On s’est assez bien soutenu.
GÉLASIME. Tant mieux, ma foi. Par ma foi, je voudrais avoir mille boisseaux d’argent.
ÉPIGNOME. Pour quoi faire ?
GÉLASIME. Pour l’inviter à souper, lui, mais pas vous.
ÉPIGNOME. Ce que tu dis là n’est pas dans ton intérêt.
GÉLASIME. Pour vous inviter tous les deux.
ÉPIGNOME. Je t’inviterais ma foi de bon cœur s’il y avait encore de la place.
GÉLASIME. Invitez toujours ; tout en restant debout j’avalerai bien un morceau.
ÉPIGNOME. La seule chose possible…
GÉLASIME. Eh bien ?
ÉPIGNOME. C’est, quand les convives seront partis, que tu viennes…
GÉLASIME. La peste vous étrangle !
ÉPIGNOME. Pour le bain, pas pour le souper.
GÉLASIME. Les dieux vous exterminent ! Et vous, Pamphilippe ?
PAMPHILIPPE. Ma foi, j’ai promis d’aller souper dehors.
GÉLASIME. Comment, dehors ?
PAMPHILIPPE. Oui, dehors.
GÉLASIME. Quelle drôle d’idée, fatigué comme vous êtes, d’aller souper en ville !
PAMPHILIPPE. Tu crois ?
GÉLASIME. Dites qu’on apprête à souper chez vous, et dégagez-vous de cette invitation.
PAMPHILIPPE. Pour souper tout seul à la maison ?
GÉLASIME. Pas tout seul : invitez-moi.