Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/420

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personne qui pût éventer la mèche. Si donc il revient ici sain et sauf, je lui rendrai ce qui lui appartient ; s’il lui arrive malheur, j’ai une dot tout assurée à donner à la fille qu’il m’a confiée, pour lui faire faire un mariage convenable.

MÉGARONIDE. Dieux immortels ! comme vous m’avez changé en un moment avec peu de paroles ! J’étais venu vous trouver dans de tout autres dispositions. Mais puisque vous avez commencé, continuez votre récit.

CALLICLÈS. Que vous dirai-je ? la sagesse de mon ami, ma fidélité, nos secrets, ce mauvais sujet a failli tout mettre sens dessus dessous.

MÉGARONIDE. Comment cela ?

CALLICLÈS. Je vais passer six jours seulement à la campagne, et pendant mon absence, à mon insu, sans me consulter, il pose un écriteau pour mettre en vente la maison.

MÉGARONIDE. Le loup était enragé de faim et la gueule béante : il épiait le sommeil du chien et voulait enlever tout le troupeau.

CALLICLÈS. Il l’aurait fait, ma foi, si le chien n’avait eu le nez fin. Mais à présent, je vous interroge à mon tour : quel était mon. de voir ? dites-le-moi. Devais-je lui révéler le trésor, au mépris des supplications de son père ? Devais-je souffrir que la maison changeât de maître, pour que l’acquéreur mit la main sur l’argent ? J’ai mieux aimé acheter moi-même, j’ai payé pour sauver le trésor et le rendre intact à mon ami. Et je n’ai pas acheté pour moi, pour mon usage : je lui ai racheté sa maison, j’ai tiré les fonds de ma poche. Que ce soit bien, que ce soit mal, voilà comment j’ai agi ; je conviens de ce que j’ai fait, Mégaronide. Voilà mes méfaits, voilà ma cupidité. Et c’est pour cela que les bonnes langues me déchirent ?

MÉGARONIDE. Arrêtez-vous ; vous triomphez de votre censeur ; vous me fermez la bouche, et je n’ai rien à répliquer.

CALLICLÈS. Maintenant, je vous en prie, assistez-moi, aidez-moi de vos conseils, partagez avec moi mon fardeau.

MÉGARONIDE. Vous pouvez compter sur moi.

CALLICLÈS. Alors, où serez-vous tout à l’heure ?

MÉGARONIDE. A la maison.

CALLICLÈS. C’est tout ce que vous me vouliez ?

MÉGARONIDE. Ne bronchez pas dans vos principes.

CALLICLÈS. C’est à quoi je m’applique.

MÉGARONIDE. Mais dites-moi.

CALLICLÈS. Qu’est-ce ?