Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/470

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DINARQUE. Entrerai-je donc ?

ASTAPHIE. Pourquoi pas ? aussi hardiment que chez vous. Vous nous appartenez aussi maintenant, Dinarque.

DINARQUE. Reviendras-tu bientôt ?

ASTAPHIE. Dans un moment ; je ne vais qu’à deux pas. Dinarque. Alors, reviens bien vite ; j’attendrai chez vous.

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ACTE II.


SCÈNE I. - ASTAPHIE.


Ouf ! je respire, le fâcheux est entré. Me voilà seule enfin. Je puis dire librement et à mon aise tout ce que je voudrai, tout ce qui me passera par la tête. Ma maîtresse vient de faire au logis l’oraison funèbre des biens de notre galant ; terres et maisons, tout est hypothéqué pour le déjeuner de l’amour. Elle lui dit à cœur ouvert ses projets les plus importants ; elle a en lui un ami pour le conseil plutôt que pour la bourse. Tant qu’il a eu, il a donné ; à présent il n’a plus rien ; c’est nous qui avons ce qu’il avait, et c’est lui qui a ce que nous avions. C’est dans l’ordre ; en un tour de main la fortune change, il n’y a que hauts et bas dans la vie. Nous nous souvenons qu’il était riche, il se rappelle que nous étions pauvres. Les temps sont bien différents. Il faudrait être sot pour s’en étonner. S’il est mal en point, il faut bien qu’il nous permette de chercher notre vie : c’est de toute justice. Il ferait beau voir que nous eussions pitié de ceux qui gaspillent leurs biens. Une bonne louve doit avoir de bonnes dents, sourire à tout venant, lui dire des douceurs. méditer sa perte au fond du cœur, avec de belles paroles sur la langue. Il faut qu’une vraie courtisane soit comme un buisson d’épines ; vous y touchez, laissez-y de votre laine. Elle n’a pas à écouter les raisons de son amoureux ; il ne donne rien ? qu’elle le congédie comme un mauvais soldat ! On ne peut être bon amant sans être le bourreau de son patrimoine. La belle affaire si, quand il vient de donner, il n’est pas en humeur de donner encore ! Celui qu’on aime chez nous, c’est celui qui donne et ne s’en souvient plus. Il est riche ? qu’il fasse l’amour ; il est pauvre ? qu’il se mette en quête d’un autre métier. S’il n’a plus rien, qu’il fasse place, et de bonne grâce, à ceux dont la bourse est rondelette. L’amant comme il faut est celui qui, sans souci de