Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/51

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DÉMIPHON. Les dieux vous confondent ! Qu’est-ce que cela signifie ?

EUTYQUE. Je vais vous le dire. Écoutez-moi tous deux.

LYSIMAQUE. Nous sommes tout oreilles.

EUTYQUE. Les fils de bonne famille, s’ils ont un mauvais penchant, déshonorent leur race ; leurs vices démentent leur origine.

DÉMIPHON. Il dit vrai.

LYSIMAQUE. C’est pour vous qu’il parle.

EUTYQUE. Cela est d’autant plus vrai. A votre âge, vous aviez tort d’enlever à votre fils, à un jeune homme amoureux, la maîtresse qu’il s’était achetée de son argent.

DÉMIPHON. Comment ! c’est la maîtresse de Charinus !

EUTYQUE. Qu’il est fin à dissimuler !

DÉMIPHON. Il m’a dit que c’était une servante qu’il avait achetée pour sa mère.

EUTYQUE. C’est donc pour cela que vous en avez fait emplette, amoureux novice, ci-devant jeune homme ?

LYSIMAQUE. C’est cela, bravo ! Continue, je vais me mettre de l’autre côté. Accablons-le tous les deux des reproches qu’il mérite.

DÉMIPHON. Je ne sais où me fourrer.

LYSIMAQUE. Avoir fait une telle avanie à un fils qui ne se l’était pas attirée !

EUTYQUE. Et, ma foi, je viens de le ramener au moment où il partait pour l’exil.

DÉMIPHON. Il est parti ?

LYSIMAQUE. Vous parlez encore, vieux masque ? A votre âge, on devrait s’abstenir de pareils déportements. De même que les saisons de l’année, les âges de la vie amènent des occupations différentes. S’il est permis aux vieillards de courir les filles, que deviendra la république ?

DÉMIPHON. Hélas ! c’est fait de moi.

EUTYQUE. L’amour est l’affaire des jeunes gens.

DÉMIPHON. Prenez-la, de grâce, avec les paniers et les corbeilles[1].

EUTYQUE. Rendez-la à votre fils ; qu’elle soit à lui.

DÉMIPHON. Comme il voudra, je consens à ce qu’il la garde.

EUTYQUE. A la bonne heure, maintenant que vous ne pouvez faire autrement.

  1. Qui contenaient les provisions achetées pour le dîner.