Page:Pline l'ancien - Histoire naturelle, Littré, T2 - 1850.djvu/409

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Les Gracques furent les premiers qui attachèrent à l’ordre équestre le titre de juges, cherchant à la fois une popularité séditieuse et l’abaissement du sénat. Après la chute des Gracques, l’autorité du nom équestre se fixa, à travers les incidents variés des séditions, sur les publicains, qui pendant quelque temps furent les hommes de la troisième classe. Enfin M. Cicéron consolida le nom équestre lors de son consulat et de la conspiration de Catilina, se vantant sans cesse d’être sorti de cet ordre, et le faisant l’objet spécial de ses prévenances, pour s’en concilier l’appui. C’est depuis ce temps que les chevaliers ont définitivement formé le troisième corps de l’Etat, et que le nom de l’ordre équestre a été ajouté à la formule : le sénat et le peuple romain ; et si aujourd’hui même l’ordre équestre n’est nommé qu’après le peuple, c’est qu’il n’a été constitué que le dernier.

IX. La dénomination des chevaliers, même de ceux qui la tenaient de leur service dans la cavalerie, a souvent varié : ils furent nommés célères sous Romulus et les rois, puis flexumines, ensuite trossules, parce qu’ils avaient pris, sans aucun secours de l’infanterie, une ville d’Etrurie nommée Trossulum, et située à neuf mille pas en deçà de Volsinies. Cette dernière désignation subsista jusqu’après la mort de C. Gracchus ; du moins trouve-t-on ce fait attesté dans les écrits de Junius, surnommé Gracchanus, à cause de son amitié pour ce tribun : « Quant à ce qui regarde l’ordre équestre, dit Junius, on donnait à ses membres le nom de trossules ; on leur donne maintenant celui de chevaliers, et nombre de chevaliers rougissent d’être appelés trossules, parce qu’ils ne connaissent pas le sens de cette dénomination ». Et après cela Junius en expose la raison, que j’ai indiquée plus haut, et ajoute que, bon gré mal gré, ils sont encore appelés trossules.

X. L’or est le sujet de quelques autres distinctions, qui ne doivent pas non plus être omises. Nos aïeux donnèrent des colliers d’or aux troupes auxiliaires et aux étrangers, mais ils n’en donnèrent jamais que d’argent aux citoyens ; de plus, ils donnèrent des bracelets aux citoyens, et jamais aux étrangers.

XI. Quant aux couronnes d’or, ce qui doit paraître étonnant, ils en ont accordé même aux citoyens. Je n’ai trouvé nulle part le nom du premier qui en reçut une ; mais on sait qui le premier décerna cette distinction. D’après L. Pison, ce fut le dictateur A. Postumius (an de Rome 323) : ayant forcé le camp des Latins auprès du lac Régille, il accorda, sur le produit du butin, une couronne d’or à celui qui avait le plus contribué à ce succès. L. Lentulus, consul (an de Rome 479), en donna une du poids de cinq livres à Servius Cornélius Merenda, après la prise d’une ville samnite. Pison Frugi en décerna une à son fils ; mais, la prenant sur ses propres deniers, il lui en légua la valeur par la première clause de son testament.

XII. (III.) Dans les sacrifices, pour honorer les dieux, on n’a rien imaginé de plus que de dorer les cornes des victimes, mais des grandes seulement, qu’on leur immole. Le luxe de l’or fit parmi les militaires de grands progrès ; et l’on a des lettres de M. Brutus, écrites des plaines de Philippes, où il s’indigne contre les agrafes d’or portées par les tribuns. Mais toi-même, Brutus, tu n’as pas parlé de l’or que les femmes portent