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LIVRE DEUXIÈME.


fois divisée et indivise ; ou plutôt, elle n’est jamais divisée réellement, elle ne se divise jamais : car elle demeure tout entière en elle-même. Si elle semble se diviser, ce n’est que par rapport aux corps, qui, en vertu de leur propre divisibilité, ne peuvent la recevoir d’une manière indivisible. Ainsi la division est le fait du corps et non le caractère propre de l’âme[1].

II. Telle devait être la nature de l’âme : elle ne pouvait être ni purement indivisible, ni purement divisible, mais elle devait être nécessairement indivisible et divisible, comme on vient de l’exposer. C’est ce que prouvent encore les considérations suivantes :

Si l’âme, comme le corps, avait plusieurs parties différentes les unes des autres, on ne verrait pas, quand une des parties sent, une autre partie éprouver la même sensation[2] ; mais chaque partie de l’âme, celle qui est dans le

  1. Voy., dans le tome I, les Fragments de Porphyre, p. XLIII, § XV-XVIII ; et les Éclaircissements, p. 367-368.
  2. Voici comment saint Augustin reproduit celle argumentation de Plotin sur la sympathie qui unit les organes : Moles omnis quæ occupat locum non est in singulis suis partibus tota, sed in omnibus ; quare alia pars ejus alibi est, et alibi alia. Anima vero non modo universæ moli corporissui, sed etiam unicuique particulæ illius tota simul adest. Partis enim corporis passionem tota sentit, nec in toto tamen corpore. Quum enim quid dolet in pede, advertit oculus, loquitur lingua, admovetur manus. Quod non fieret, nisi id quod animæ in eis partibus est et in pede sentiret ; nec sentire quod ibi factura est absens potest. Non enim nuntio aliquo credibile est fieri non sentiente quod nuntiat : quia passio quae fit, non per continuationem molis currit, ut ceteras animæ partes quæ alibi sunt latere non sinat, sed illud tota sentit anima quod in particula fit pedis, et ibi tantum sentit ubi fit. Tota igitur singulis partibus simul adest, quæ tota simul sentit in singulis. » (De Immortalitate animœ, 16.) Par les mots per continuationem molis saint Augustin entend ici la continuité des parties, dont Plotin parle quelques lignes plus bas. Saint Augustin répète encore le même raisonnement dans sa Lettre CLXVI, De Origine animæ hominis, § 2.