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QUATRIÈME ENNÉADE.


qui embrasse tout en même temps et dirige tout avec sagesse, nature à la fois multiple, parce que les êtres sont multiples, et une, parce que le principe qui contient tout doit être un : c’est par son unité multiple qu’elle communique la vie à toutes les parties de l’univers ; c’est par son unité indivisible qu’elle dirige tout avec sagesse. Dans les choses mêmes qui n’ont pas de sagesse, l’unité qui y joue le rôle de principe dirigeant imite l’unité de l’Âme universelle. C’est là ce que Platon a voulu indiquer allégoriquement par ces paroles divines : « De l’essence indivisible et toujours la même, et de l’essence qui devient divisible dans les corps, Dieu forma par leur mélange une troisième espèce d’essence[1]. »

L’Âme [universelle] est donc à la fois une et multiple [comme nous venons de le dire] ; les formes des corps sont multiples et unes ; les corps ne sont que multiples ; enfin le principe suprême [l’Un] est seulement un.


  1. Platon dit dans le Timée, p. 35 : τῆς ἀμερίστου ϰαὶ ἀεὶ ϰατὰ ταύτα ἐχούσης οὐσίας ϰαὶ τῆς αὖ περὶ τὰ σώματα γιγνομένης μεριστῆς τρίτον ἐξ ἀμφοῖν ἐν μέσῳ ξυνεϰέρασατο οὐσίας εἶδος. M. H. Martin, que nous avons cité pour la traduction de ce passage dans les Éclaircissements du tome 1 (p. 366), traduit les mots : τῆς περὶ τὰ σώματα γιγνομένης μεριστῆς, de l’essence corporelle divisible et qui naît toujours ; et Ficin : ex essentia quæ circa corpora fit partibilis. Nous avons adopté le sens donné par Ficin, parce qu’il est le seul conforme à la manière dont Plotin interprète ce passage de Platon dans les livres I et II de l’Ennéade IV, de même que dans le livre III, § 19, où notre auteur s’exprime ainsi : « Platon dit que l’âme devient divisible dans les corps, et non qu’elle est devenue telle. »