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LIVRE TROISIÈME.


Maintenant, venons à ceux qui prétendent que nos âmes elles-mêmes sont des émanations de l’Âme universelle (ἐϰ τῆς τοῦ παντὸς ψυχῆς ϰαὶ τὰς ἡμετέρας εἶναι)[1].

Ils soutiendront peut-être que, pour démontrer que nos âmes ne sont pas des parcelles de l’Âme universelle, il ne suffit pas de faire voir que nos âmes vont aussi loin [dans leur procession] que l’Âme universelle[2], ni qu’elles lui ressemblent par leurs facultés intellectuelles, en supposant toutefois qu’ils admettent cette ressemblance : car ils diront que les parties sont conformes au tout qu’elles composent[3]. Ils invoqueront l’autorité de Platon et soutiendront qu’il professe cette opinion dans le passage où il affirme en ces termes que l’univers est animé : « Comme notre corps est une partie de l’univers, notre âme est une partie de l’Âme de l’univers[4]. » Platon, ajouteront-ils, dit et dé-

  1. Première question : Toutes les âmes ne sont-elles que les émanations ou les parties d’une seule âme (§ 1-8) ? On a déjà vu ci-dessus (p. 9, 15, 38, 70) Plotin combattre l’opinion d’Héraclite et des Stoïciens qui n’admettaient qu’une seule âme dans l’univers. Dans le morceau suivant, qu’il faut rapprocher du livre IX de cette Ennéade, il paraît avoir pour but de réfuter quelques-uns des nouveaux Pythagoriciens qui, tels qu’Apollonius de Tyane et Numénius, pensaient que les âmes particulières ne sont que les parties entre lesquelles se divise et se distribue l’Âme totale du monde (Voy. M. Ravaisson, Essai sur la métaphysique d’Aristote, t. II, p. 325-328, 341-343, 391), et peut-être aussi les Manichéens, comme on le verra ci-après par la note 1 de la page 268. En tout cas, les philosophes que Plotin combat ici professaient une doctrine analogue à celle qu’Averrhoès enseigna au moyen âge, comme Ficin le remarque judicieusement dans son Commentaire. Nous ajouterons que l’argumentation de Plotin ressemble sur plusieurs points à celle que saint Thomas a développée dans ses écrits contre Averrhoès. Voy. ci-après, p. 271, note 1, et p. 274, note 1.
  2. Voy. ci-après, § 6, p. 275.
  3. Il y a dans le texte grec : « εἶναι γὰρ ὁμοειδῆ ϰαὶ τὰ μέρη τοῖς ὅλοις. Ficin traduit : « esse namque dicent partes toti conformes. » Le sens de cette expression est expliqué dans le § 2, p. 264.
  4. Plotin ne cite pas ici Platon textuellement. Voici le passage qu’il résume. « Socrate. Je te demande