l’Âme dont le corps n’a pas besoin. Il en est de même des autres âmes : leurs puissances en général ne sont pas présentes au corps, les puissances dont le corps a besoin y sont seules présentes ; et elles y sont présentes sans être édifiées (ἐνιδρυθέντα)[1] ni sur les membres ni sur le corps entier : pour la sensation, la faculté de sentir est présente tout entière à tout l’organe qui sent [au cerveau tout entier] ; de même, pour les autres fonctions, les diverses facultés sont présentes chacune à un organe différent. Je vais m’expliquer.
XXIII. Puisque, pour le corps, être animé c’est être pénétré de la lumière que répand l’âme, chaque partie du corps y participe d’une façon particulière ; chaque organe, selon son aptitude, reçoit la puissance propre à la fonction qu’il remplit[2] : c’est ainsi qu’on dit que la puissance de la vue réside dans les yeux ; celle de l’ouïe, dans les oreilles ; celle du goût, dans la langue ; celle de l’odorat, dans le nez ; et celle du tact, dans le corps entier, puisque, pour ce dernier sens, le corps entier est l’organe de l’âme. Or, comme le tact a pour instruments les premiers nerfs, qui possèdent aussi la puissance de mouvoir l’animal (πρὸς τὴν ϰίνησιν τοῦ ζώου ἡ δύναμις) et sont le siége de cette puissance ; comme en outre les nerfs ont leur origine dans le cerveau, on y a placé le principe de la sensation et de l’appétit (ἡ τῆς αἰσθήσεως ϰαὶ ὁρμῆς ἀρχή) en un mot de tout l’animal[3], parce que l’on pensait sans
- ↑ Voy. t. I, p. 360, note 3.
- ↑ « Chaque sens est dans l’organe en tant que cet organe est spécial. » (Aristote, De l’Âme, III, 2, p. 269 de la trad.) Voy. encore les fragments de Porphyre, Des facultés de l’âme (t. I, p. XCII-XCIII).
- ↑ Plotin s’écarte ici de Platon qui, dans le Timée, attribue aux veines les fonctions des nerfs et en fait les organes de la sensibilité et du mouvement
l’Âme universelle qui n’a point de rapport avec le corps est la Puissance principale de l’Âme ; celle qui fait vivre le corps par sa présence est la Puissance naturelle et génératrice (t. I, p. 180, 191-193).