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LIVRE TROISIÈME.


doute que la puissance qui se sert des organes est présente dans la partie du corps où sont les origines de ces organes. Il eût mieux valu dire que l’action de la puissance qui se sert des organes a son origine dans le cerveau : car la partie du corps de laquelle part le mouvement imprimé à l’organe devait servir en quelque sorte de fondement à la puissance de l’artisan[1], puissance dont la nature est en harmonie avec celle de l’organe [qu’elle met en mouvement] ; ou plutôt cette partie du corps ne sert pas de fondement à cette puissance, car cette puissance est partout, mais le principe de l’action est dans la partie du corps dans laquelle est le principe même de l’organe.

D’un autre côté, comme la puissance sensitive et la puis-

    (H. Martin, Études sur le Timée, t. II, p. 301-303, 314-317). Il s’écarte également d’Aristote qui considère le cœur comme le siége des sensations (Des parties des animaux, II, 10 ; III, 5). Il suit la doctrine de Galien, d’après lequel le cerveau est l’origine des nerfs, le foie le principe et le centre des veines, le cœur le point de départ et l’origine de toutes les artères, et le sang épais que le foie forme par l’élaboration des aliments diffère du sang spiritualisé (c’est-à-dire rendu plus subtil et plus léger par le mélange du souffle) que le cœur distribue dans le corps ; il en résulte que le cerveau est le siége de la raison, de la faculté de sentir et d’imprimer le mouvement volontaire, que le foie sert d’instrument à la faculté concupiscible, nutritive, végétative, naturelle, et le cœur à la colère, c’est-à-dire à cette énergie naturelle qui commande à l’appétit et nous rend capables d’action. Voy. à ce sujet le Mémoire de M. Chauvel sur le traité de Galien intitulé : Des Dogmes d’Hippocrate et de Platon, Paris, 1857, p. 80-93.

  1. « Le corps, étant l’instrument de l’âme, doit avoir une division analogue à celle des facultés de l’âme : car il a été combiné avec elles de manière à leur rendre tout le service possible et à ne les gêner en rien. D’ailleurs, à chaque faculté de l’âme a été affecté, pour son usage, un organe particulier du corps. L’âme peut donc être considérée comme l’ouvrier, le corps comme l’instrument, l’objet de l’action comme la matière, et l’action elle-même comme l’œuvre. » (Némésius, De La Nature de l’homme, V, p. 91 de la trad. de M. Thibault.)