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QUATRIÈME ENNÉADE.


[comme le font les Atomistes[1]] qu’elles se meuvent dans le vide, supposent qu’il y a un espace libre afin que les images ne soient pas arrêtées ; par conséquent, comme elles seront d’autant moins arrêtées qu’il n’y aura pas de milieu, cette opinion n’est pas contraire à notre hypothèse.

Quant à ceux qui pensent que la vision s’opère par sympathie[2], ils diront que l’on voit moins bien quand il y a un milieu, parce que ce milieu empêche, entrave et affaiblit la sympathie. Dans ce cas, en effet, le milieu eût-il la même nature et fût-il affecté de la même manière, il affaiblit nécessairement la sympathie. Il se passe alors la même chose que pour un corps qui est profondément brûlé par le feu qu’on en approche : les parties intérieures sont moins affectées, parce qu’elles sont protégées par les parties extérieures. Mais, si les parties d’un seul et même animal éprouvent des affections sympathiques, seront-elles moins affectées parce qu’il y a un milieu ? Oui, sans doute. L’affection sera affaiblie, selon la nature du milieu, parce que ce milieu empêche toute affection excessive, à moins que ce qui est transmis [par une partie à une autre] ne soit tel que le milieu ne puisse en être affecté. Mais, si l’univers est sympathique à lui-même parce qu’il constitue un animal un, et si nous sommes affectés parce que nous sommes contenus dans cet animal un et que nous en formons des parties, pourquoi ne serait-il pas nécessaire qu’il y ait continuité pour que nous sentions un objet éloigné ? Il est nécessaire qu’il y ait continuité et qu’il existe un milieu, parce que l’animal un doit être continu ; seulement, le continu [le milieu] n’est affecté que par accident ; sinon, il faudrait admettre que tout peut être affecté par tout. Mais, si tel être est affecté par tel

  1. « Epicurus affluere semper ex omnibus corporibus simulacra quœdam corporum ipsorum, eaque sese in oculos inferre, atque ita fieri sensum videndi putat. » (Aulu-Gelle, Nuits attiques, V, 16.)
  2. C’est l’opinion de Plotin lui-même.