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QUATRIÈME ENNÉADE.


nèbres, tandis que, dès qu’ils ferment leurs yeux, il n’y a plus de lumière au dehors. La lumière ne périt pas alors ; seulement, elle ne se produit plus au dehors. Rentre-t-elle dans l’animal ? Elle cesse seulement d’être au dehors : car le feu visuel ne va pas au dehors, mais au dedans. La lumière même est-elle donc au dedans ? Celle-ci du moins est au dedans ; mais [l’œil étant fermé], la paupière lui fait obstacle, en sorte qu’elle n’agit plus au dehors.

Ainsi, la lumière qui émane des corps est l’acte du corps lumineux qui agit au dehors. La lumière qui se trouve dans les corps qui ont originairement une telle nature est l’essence formelle du corps originairement lumineux. Quand un pareil corps a été mêlé à la matière, il produit la couleur. L’acte seul ne suffit pas pour donner la couleur ; il ne produit que la coloration, parce qu’il est la propriété d’un sujet, qu’il en dépend, de telle sorte que rien ne peut être éloigné de ce sujet sans l’être également de son acte. La lumière est tout à fait incorporelle, quoiqu’elle soit l’acte d’un corps. On ne saurait donc dire proprement de la lumière qu’elle s’éloigne ou qu’elle est présente ; les choses se passent d’une autre manière : la lumière est l’essence du corps lumineux en tant qu’elle est son acte. L’image produite dans un miroir est donc un acte de l’objet visible, lequel agit sur ce qui peut pâtir, sans laisser rien écouler de sa substance. Si l’objet est présent, l’image paraît dans le miroir : elle est en quelque sorte l’image de la couleur qui a telle figure. Si l’objet s’éloigne, le corps diaphane n’a plus ce qu’il avait quand l’objet visible agissait sur le miroir.

Il en est de même pour la première âme : son acte demeure dans le corps tant que cette âme y demeure elle-même[1].

S’il s’agit d’une force qui ne soit pas l’acte de la première

  1. L’acte de la première âme (c’est à dire de l’âme raisonnable) est l’âme irraisonnable. Voy. les Éclaircissements du tome I, p, 362-366.