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LIVRE SEPTIÈME.


admettre que les sensations viennent aboutir à un même principe, comme les faits le démontrent : ainsi, les images visibles se resserrent dans la pupille ; sans cela comment verrions-nous par elle les plus grands objets[1] ? Donc, à plus forte raison, les sensations qui viennent aboutir au principe dirigeant (τὸ ἡγεμονοῦν)[2] doivent ressembler à des intuitions indivisibles et être perçues par un principe indivisible. Si celui-ci était étendu, il pourrait se diviser comme l’objet sensible : chacune de ses parties percevrait ainsi une des parties de l’objet sensible, et rien en nous ne saisirait l’objet dans sa totalité. Il faut donc que le sujet qui perçoit soit tout entier un ; sinon, comment se diviserait-il ? On ne saurait le faire en quelque sorte coïncider avec l’objet sensible (comme deux figures égales posées l’une sur l’autre), » parce que le principe dirigeant n’a pas une étendue égale à celle de l’objet sensible[3]. Comment donc opérera-t-on la division ? Veut-on qu’il y ait dans le sujet qui sent autant

  1. « Quum autem oculi medium, quæ pupilla dicitur, nihil aliud sit quam quoddam punctum oculi, in quo tamen tanta vis est ut eo dimidium cœlum, cujus ineffabile spatium est, ex aliquo eminenti loco cerni collustrarique possit, non abhorret a vero animum carere omni corporea magnitude, quæ tribus illis differentiis consummatur, quamvis corporum magnitudines quaslibet imaginari queat. » (S. Augustin, De Quantitate animœ, 14.)
  2. Voy. ci-dessus, p. 258.
  3. Saint Augustin se sert du même argument pour prouver que l’âme n’a point d’étendue : « Cur ergo, quum tam parvo spatio sit anima quam corpus est ejus, tam magnæ in ea possunt exprimi imagines, ut et urbes, et latitude terrarum, et quæque alia ingentia apud se possit imaginari ? Volo enim cogites paulo diligentius quanta et quam multa memoria nostra contineat, quæ utique anima continentur. Quis ergo fundus est, quis sinus, quæ immensitas quæ possit hæc capere, quum eam tantam quantum corpus est superior ratio docuisse videatur, etc. ? » (De Quantitate animœ, 5.) Voy. aussi le traité De l’Âme et de son origine (IV, 27), traité que saint Augustin a composé pour réfuter un certain Vincentius Victor, qui soutenait, comme le faisaient les Stoïciens, que l’âme est un corps.