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LIVRE SEPTIÈME.


que notre âme est mortelle, tandis que l’Âme universelle est immortelle ? Qu’on rende alors raison de cette différence. Chacune des deux est un principe de mouvement, vit par elle-même, saisit les mêmes objets par la même faculté, soit qu’elle pense les choses contenues dans le ciel ou supérieures au ciel, soit qu’elle considère l’essence de chaque être et qu’elle remonte jusqu’au premier principe. Puisque notre âme pense les essences absolues soit par les notions qu’elle en trouve en elle-même, soit par la réminiscence, évidemment elle est antérieure au corps ; possédant des connaissances éternelles, elle doit être elle-même éternelle. Tout ce qui se dissout, n’existant que par sa composition, peut naturellement se dissoudre de la même manière qu’il est composé. Mais l’âme est un acte un, simple, dont l’essence est la vie ; elle ne peut donc périr de cette manière. Périra-t-elle en se divisant en une foule de parties ? Mais, comme nous l’avons démontré, l’âme n’est ni une masse, ni une quantité. Périra-t-elle en s’altérant ? L’altération, en détruisant une chose, lui enlève sa forme et lui laisse sa matière ; c’est donc le propre d’un composé. Par conséquent, puisque l’âme ne peut périr d’aucune de ces façons, elle est impérissable.

XIII. Comment se fait-il que l’âme descende dans un corps[1], puisque les intelligibles sont séparés des choses sensibles ? — Tant que l’âme est une intelligence pure, impassible, qu’elle jouit d’une vie purement intellectuelle comme les autres êtres intelligibles, elle demeure parmi eux : car elle n’a ni appétit ni désir. Mais, la partie qui est inférieure à l’Intelligence et capable d’avoir des désirs suit leur impulsion, procède (πρόεισιν) et s’éloigne du monde intelligible. Désirant orner la matière sur le modèle des idées qu’elle a contemplées dans l’Intelligence, pressée de déployer sa fé-

  1. Sur la descente de l’âme dans le corps, Voy. ci-après le livre VIII, § 5, p. 488.