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QUATRIÈME ENNÉADE.


et de mettre au jour les germes qu’elle porte en son sein[1], l’âme s’applique la produire et il créer, et, par suite de cette application, elle est en quelque sorte tendue vers les objets sensibles. D’abord, elle partage avec l’Âme universelle le soin d’administrer le monde entier, sans y entrer cependant ; puis, voulant en administrer seule une partie, elle se sépare de l’Âme universelle, et passe dans un corps. Mais, lors même qu’elle est présente au corps, l’âme ne se donne pas à lui tout entière, quelque chose d’elle en reste dehors : ainsi, son intelligence reste impassible[2].

L’âme est tantôt dans le corps, tantôt dehors. En effet, quand, écoutant son inclination, elle descend des choses qui occupent le premier rang [c’est-à-dire des choses intelligibles] à celles qui occupent le troisième [c’est-à-dire vers les choses d’ici-bas], elle procède (προελθοῦσα) par la vertu de l’acte de l’Intelligence, qui, restant en elle-même, embellit tout par le ministère de l’âme, et qui, étant elle-même immortelle, ordonne tout par une puissance immortelle : car l’Intelligence existe toujours par un acte continu[3].

XIV. Quant aux animaux inférieurs à l’homme, les âmes [raisonnables] qui ont poussé l’égarement jusqu’à descendre dans des corps de brutes sont cependant immortelles aussi[4]. S’il y a des âmes d’une autre espèce [que les âmes raisonnables], elles ne peuvent procéder que de la nature vivante [c’est-à-dire de l’Âme universelle[5]], et elles sont nécessairement des principes de vie pour tous les animaux. Il en est de même des âmes qui sont dans les végétaux[6]. En effet, toutes les âmes sont sorties du même prin-

  1. Ces expressions sont empruntées au Banquet de Platon (p. 206 ; t. VI, p. 312, 313 de la trad. de M. Cousin.)
  2. Voy. ci-après le livre VIII, § 8.
  3. Pour le sens de ce passage, Voy. ci-après le livre VIII, § 6-7.
  4. Sur la nature animale dans la bête, Voy. t. I, p. CXII, note 7 ; p. 377-380, 385-386.
  5. Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § XXXIX, t. I, p. LXXX.
  6. Plotin, en accordant une âme aux plantes, se conforme à l’opi-