<span title="Nombre II écrit en chiffres romains" style="text-transform:uppercase;">II. Laissons maintenant de côté les arts. Considérons les objets qu’ils imitent, je veux dire les beautés naturelles, les êtres raisonnables et les choses privées de raison ; considérons surtout celles qui sont les plus parfaites, où le créateur a pu maîtriser la matière et lui donner la forme qu’il voulait. Qu’est-ce donc qui constitue la beauté dans ces objets ? Ce n’est assurément pas le sang, ce ne sont pas les menstrues (ϰαταμήνια (katamênia)), mais ce sont la couleur et la figure, qui en diffèrent essentiellement ; sinon, ce qui constitue la beauté est une chose indifférente, ou une chose informe, ou une chose qui contient une nature simple [la raison séminale], comme le fait la matière, par exemple[1].
D’où vient donc la beauté brillante de cette Hélène pour qui furent livrés tant de combats ? D’où vient la beauté de tant de femmes comparables à Vénus ? D’où vient la beauté de Vénus elle-même ? D’où vient celle d’un homme parfait, et celle d’un de ces dieux qui se montrent à nos yeux ou qui, sans se montrer, ont cependant une beauté visible ? Ne vient-elle point partout de la forme qui du principe créateur passe dans la créature, comme, dans l’art, ainsi que nous l’avons reconnu, la beauté passe de l’artiste dans l’œuvre ? Faut-il admettre que les créatures et la raison [séminale] unie à la matière sont belles, tandis que la raison qui ne se trouve pas unie à la matière, qui réside dans
- ↑ Pour comprendre ce passage, il faut le rapprocher de la phrase qui commence le troisième alinéa, p. 110, ligne 19.
illud, ut ex ore aliquo, quasi imago exprimatur, quod neque oculis, neque auribus, neque ullo sensu percipi potest, cogitatione tantum et mente complectimur… Nec vero ille artifex [Phidias], quum faceret Jovis formam aut Minervæ, contemplabatur aliquem e quo similitudinem duceret ; sed ipsius in mente insidebat species pulchritudinis eximia quaedam, quam intuens, in eaque defîxus, ad illius similitudînem artem et manum dirigebat. » (Orator, 2.) Sénèque le rhéteur dit aussi : « Non vidit Phidias Jovem… Dignus tamen illa arte animus et concepit Deos et exhibuit. » (Controversiœ, V, 36.)