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LIVRE PREMIER.


l’action sont toutes deux des mouvements, elles sont dans le même genre, dans celui de l’altération[1], qui est un mouvement par rapport à la qualité[2]. — Lorsque l’altération procède de l’être doué de qualité, y a-t-il action, bien que cet être reste impassible ? Oui : car bien qu’impassible, il est actif. — Lorsqu’il agit sur un autre objet, qu’il le frappe, par exemple, et qu’il pâtit, n’est-il plus actif ? N’est-il pas plutôt actif et passif à la fois ? S’il est actif quand il pâtit, quand il frotte, par exemple, pourquoi est-il regardé plutôt comme actif que passif ? Parce que c’est en frottant qu’il est lui-même frotté et qu’il pâtit. Dirons-nous qu’il y a en lui deux mouvements parce qu’il est mû en mouvant ? Mais comment y a-t-il en lui deux mouvements ? Admettrons-nous qu’il n’y en a qu’un ? Dans ce cas, comment le même mouvement est-il à la fois action et passion ? Sans doute, il sera regardé comme action en tant qu’il procède du moteur, et comme passion en tant qu’il passe du moteur dans le mobile, sans cesser d’être une seule et même chose. Est-ce que la passion est une autre espèce de mouvement que l’action ? Comment alors le mouvement qui altère modifie-t-il d’une certaine manière ce qui pâtit sans que ce qui agit pâtisse également ? Mais comment ce qui agit sur un autre objet pourrait-il pâtir ? Suffit-il que le mouvement soit dans le mobile pour qu’il y ait passion (car ce mouvement ne constituait pas une passion dans le moteur) ? Mais si d’un côté la raison [séminale] du cygne rend blanc, et que d’un autre côté le cygne qui naît soit rendu blanc, dirons-nous que le cygne est passif en devenant ce qu’il est dans son essence d’être ? S’il devient blanc même après sa

    calcfacere mutuo frigefacientem ; aliquam comitatur extrinsecus, et hoc quidem dupliciter : aut enim actionem manifesta passio comitatur foris, ut secantem ; aut occulta, ut incedentem, imo et occultissima, ut augeri et formari corpus ab anima. »

  1. Voy. ci-après liv. iii, § 21.
  2. Voy. Aristote, Catégories, III, chap. XIV.