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CINQUIÈME ENNÉADE.

La cinquième Ennéade est consacrée à l’exposition générale de la théorie des trois hypostases divines. Elle traite plus spécialement de l’Intelligence.


LIVRE PREMIER.
DES TROIS HYPOSTASES PRINCIPALES.

(I) Pour concevoir Dieu, il faut que l’âme, se détachant des objets extérieurs, rentre en elle-même et examine sa propre nature ; par là, elle voit qu’ayant une étroite affinité avec les choses divines, elle peut et elle doit chercher à les connaître.

(II) Affranchie des liens du corps et plongée dans un recueillement profond, elle réfléchira alors que c’est l’Âme universelle qui, sans se mêler aux êtres contenus dans le monde, leur communique la forme, le mouvement et la vie. Elle se représentera donc la grande Âme, toujours entière et indivisible, pénétrant intimement le grand corps immense dont sa présence vivifie et embellit toutes les parties.

(III-V) Mais l’Âme elle-même, malgré sa dignité, procède d’un principe supérieur dont elle tient sa puissance intellectuelle : ce principe est l’Intelligence divine, parfaite, immuable, éternelle, qui renferme toutes les idées, et est ainsi l’archétype du monde sensible : car la nature de l’Intelligence est de penser, et, en se pensant elle-même, elle pense toutes les essences intelligibles, parce qu’elles ne font avec elle qu’une seule et même chose. Par là, l’Intelligence constitue les genres de l’être, principes de toutes choses, et les nombres, qui sont identiques aux idées (comme nous l’expliquons ci-après p. 575).

(V-VII) Quoique, dans l’Intelligence, le sujet pensant et l’objet pensé soient identiques, il y a là encore une dualité, et notre âme, en remontant de cause en cause, ne peut s’arrêter qu’à la conception d’un principe parfaitement simple. Se recueillant donc dans son for intérieur, elle s’élèvera de l’Intelligence à l’Un absolu. L’Un est en effet le principe suprême. Il est le Père de l’Intelligence parce qu’il lui est supérieur, que celle ci est son verbe, son acte et son image. L’Intelligence est l’image de l’Un en ce sens qu’en se tournant vers lui elle le voit, et que, par cette vision, elle se détermine elle-même, en vertu de la puissance qu’elle reçoit de son principe ; c’est encore par cette puissance qu’elle possède en elle-même toutes les idées, ainsi que le