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LIVRE DEUXIÈME.


voit l’identité naître, disons mieux, exister ? Il est donc nécessaire d’ajouter aux trois genres déjà reconnus l’identité et la différence ou bien le même et l’autre (ταὐτόν, θάτερον (tauton, thateron), deux genres nouveaux qui joints aux trois autres font en tout cinq genres pour toutes choses[1]. L’Identité et la Différence communiquent aussi leur caractère aux êtres inférieurs : car chacun d’eux a quelque chose d’identique et quelque chose de différent. C’est ainsi que l’Identité et la Différence, prises dans leur simplicité, sans que nul accident leur soit uni, se trouvent au nombre des genres.

Les cinq genres que nous reconnaissons sont premiers, parce que l’on ne peut rien affirmer d’eux dans la catégorie de l’essence (ἐν τῷ τί ἐστι (en tô ti esti)). On peut sans doute en affirmer l’être parce qu’ils sont des êtres ; mais on n’en affirme pas l’être comme genre, parce que l’essence n’est pas un être particulier. L’Être ne s’affirme pas non plus du Mouvement ni de la Stabilité, parce que ce ne sont pas là des espèces de l’Être. Il n’y a que les êtres particuliers qui puissent se rapporter à l’Être, les uns comme espèces de l’Être, les autres comme participant à l’existence. L’Être ne participe pas non plus de ces quatre genres comme s’ils étaient des genres supérieurs dans lesquels il serait compris lui-même : car la Stabilité, le Mouvement, l’Identité et la Différence ne dépassent pas la sphère de l’Être et ne lui sont pas antérieurs.

IX. Ces arguments et peut-être d’autres encore établis-

  1. De tous les genres dont nous avons parlé tout à l’heure, les plus grands sont l’être lui-même, le repos et le mouvement. Nous avons dit que les deux derniers ne peuvent pas être mêlés l’un avec l’autre. Mais l’être peut être mêlé avec tous les deux : car tous deux ils sont… Ainsi cela fait trois. Et chacun d’eux est autre que les deux autres et le même que soi. Mais qu’est-ce que nous venons de dire encore, l’autre et le même ? Sont-ce deux genres différents de ces trois-là, et qui pourtant soient toujours nécessairement mêlés avec eux, et cela fait-il en tout cinq genres au lieu de trois ? etc. » (Platon, Sophiste ; trad. de M. Cousin, t. XI, p. 279-280.)