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SIXIÈME ENNÉADE.


l’intuition, non l’intuition même ; celle-ci ne possède l’existence que parce qu’elle part de l’Être, et qu’elle se rapporte à lui. Or, comme l’Être est en acte et non en puissance, il réunit les deux termes [l’existence et l’intuition, l’objet et le sujet] et, sans les séparer, il fait que l’intuition soit lui-même, que lui-même soit l’intuition. Fondement inébranlable de toutes choses, soutien de leur existence, l’Être ne tient ce qu’il possède de rien d’étranger ; il l’a de lui et en lui. Il est à la fois le terme auquel aboutit la pensée parce qu’il est la Stabilité qui n’a pas eu de commencement, et le principe dont la pensée est née parce qu’il est la Stabilité qui n’est point née : car le Mouvement ne peut ni naître du mouvement ni aboutir au mouvement. L’idée (ἰδέα (idea)) aussi appartient au genre de la Stabilité parce qu’elle est le terme auquel aboutit l’Intelligence ; mais l’acte intellectuel par lequel elle est pensée constitue le Mouvement. Ainsi toutes ces choses ne font qu’un ; et le Mouvement, la Stabilité, les choses qui existent dans tous les êtres, constituent des genres. Chacun des êtres postérieurs à ces genres est à son tour aussi être, stabilité, mouvement.

Quand on voit ces trois choses en jetant un regard sur la nature de l’Être, quand on contemple l’Être par l’être qu’on a en soi, et les autres genres, le Mouvement et la Stabilité, par le mouvement et la stabilité qu’on a aussi en soi et qu’on met en harmonie avec ces intelligibles ; quand, unissant, confondant, mêlant les trois genres, on ne les discerne plus ; et que, peu après, on les divise, on les démêle, on les distingue, qu’on voit ainsi l’Être, le Mouvement, la Stabilité, trois choses dont chacune existe à part : n’arrive-t-il pas alors que, d’un côté, on les regarde comme différentes, qu’on les discerne par leur différence, qu’on reconnaît la différence dans l’Être en posant trois choses dont chacune existe à part ; et que, d’un autre côté, si on les considère dans leur relation avec l’unité et dans l’unité, si on les ramène toutes à être une chose une et identique, on