Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/29

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xx
SOMMAIRES.


dualité du sujet pensant et de l’objet pensé, l’intelligence est une chose multiple. L’intelligible doit être également une chose multiple, parce que s’il était absolument simple, la pensée n’y distinguerait rien, par conséquent ne le concevrait pas.

(XI) L’Intelligence divine a procédé de l’Un à l’état de simple puissance de penser. En se tournant vers lui, elle est devenue la pensée en acte, et elle a rendu multiple ce qu’elle a reçu de son principe. C’est ainsi qu’elle est à la fois intelligence, essence et pensée, tandis que l’Un, étant absolument simple, est supérieur à la pensée.

(XII) On ne saurait admettre qu’il y ait dans l’Un un acte multiple avec une essence simple et unique, parce qu’en lui l’acte est identique à l’essence. Il est donc supérieur à la faculté de connaître, et l’Intelligence, qu’il engendre tout en restant immobile, est donc le premier principe connaissant.

(XIII-XIV) Étant supérieur à la faculté de connaître, l’Un ne peut être saisi tout entier par la pensée ni énoncé par la parole : car l’absolu est ineffable parce qu’il est au-dessus de toute détermination. On ne saurait donc attribuer à l’Un la conscience dans le sens ordinaire du mot. Ne pouvant ainsi ni le saisir par la pensée ni l’énoncer par la parole, on doit se borner à dire de lui ce qu’il n’est pas et affirmer de lui seulement qu’il est le principe de toutes choses.

(XV) L’Un est la puissance qui produit toutes choses, parce qu’étant absolument simple il n’est aucune d’elles en particulier. L’hypostase qu’il engendre est multiple, parce qu’elle est inférieure : elle renferme toutes choses, mais ces choses sont logiquement distinctes ; il en résulte que l’Intelligence est unité-totalité et que chaque intelligible est unité-multiple.

(XVI-XVII) Sous un point de vue, le Premier est l’Un parce qu’il est en vertu de sa simplicité le principe dont procède l’Intelligence. Sous un autre point de vue, il est le Bien, parce qu’il est en vertu de sa perfection le but auquel l’Intelligence aspire dans sa conversion. Considéré en lui-même, il est l’Absolu dans une souveraine indépendance de toutes choses ; il est le principe créateur de l’essence et de l’existence absolue, qui appartient en propre à l’Intelligence. Par sa nature, il est ineffable et incompréhensible. Il ne peut être atteint que par une sorte de contact intellectuel. On doit croire qu’on l’a vu quand une lumière soudaine a éclairé l’âme.


LIVRE QUATRIÈME.
COMMENT PROCÈDE DU PREMIER CE QUI EST APRÈS LUI. DE L’UN.

(I) Au-dessus de toutes choses existe un principe suprême, appelé l’Un, parce qu’il est souverainement simple, et le Premier, parce qu’il est souverainement absolu.

Au-dessous de lui est l’Intelligence, qui constitue l’Un-multiple. Le Premier principe l’engendre parce qu’il est la puissance première, et que c’est une loi