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LIVRE DEUXIÈME.


subsisterait déjà avant d’avoir la qualité et ne recevrait du dehors que la propriété d’être telle ou telle. L’Essence absolue doit au contraire posséder essentiellement tout ce qui la constitue.

Au reste, nous avons reconnu ailleurs[1] que ce qui est complément de l’essence n’est appelé qualité que par homonymie, que ce qui vient du dehors et après l’essence est proprement qualité ; que ce qui appartient en propre à l’essence en est l’acte, que ce qui vient après elle est passion [modification passive]. Nous ajoutons maintenant que ce qui se rapporte à une certaine essence ne peut à aucun titre être complément de l’essence. Il n’est besoin d’aucune addition d’essence à l’homme, en tant qu’homme, pour qu’il soit une essence. L’essence existe déjà dans une région supérieure avant qu’on descende à la différence spécifique : ainsi l’animal existe [comme essence] avant qu’on descende à la propriété de raisonnable [comme différence spécifique, quand on dit : L’homme est un animal raisonnable][2].

XV. Comment quatre des genres complètent-ils donc l’essence, sans toutefois constituer telle essence (ποιὰ ὀυσίά (poia ousia)) ? car ils ne forment pas une certaine essence. — Nous avons déjà parlé de l’Être premier et montré que ni le mouvement, ni la stabilité, ni la différence, ni l’identité ne sont rien d’autre que lui. Il est clair que le mouvement n’introduit pas davantage dans l’Être une qualité ; cependant il sera bon de s’arrêter à cette proposition pour l’éclaircir,

Si le mouvement est l’acte de l’essence, si l’Être et en général tout ce qui est au premier rang est essentiellement en acte, le mouvement ne peut être considéré comme un accident ; mais, étant l’acte de l’Être qui est en acte, il ne

  1. Voy. Enn. II, liv. VI, § 2 ; t. II, p. 240.
  2. Pour le développement de cette idée, Voy. ci-après, liv. VII, § 3-6.