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LIVRE DEUXIÈME.


d’ailleurs prendre garde de perdre chaque genre dans les espèces, et, d’un autre côté, de le réduire à l’état d’un simple prédicat en ne le considérant que dans ses espèces. Il faut que le genre existe à la fois dans les espèces et en lui-même, que tout en se mêlant [aux espèces] il reste en lui-même pur et sans mélange : car, en concourant à l’essence autrement [par son mélange avec les espèces], il s’anéantirait lui-même. Telles sont les questions que nous ayons à examiner.

Maintenant, comme nous avons dit précédemment que ce qui comprend en soi tous les êtres, c’est l’intelligence et même chaque intelligence, que nous avons placé l’Être ou l’Essence au-dessus de toutes les espèces qui en sont les parties, et que nous avons dit que l’Être n’est pas encore l’Intelligence[1], nous reconnaissons par là même que l’Intelligence déjà développée est quelque chose de postérieur. Nous allons mettre à profit l’étude de cette question afin d’atteindre le but que nous nous sommes proposé [pour déterminer le rapport du genre avec les espèces qu’il contient] ; nous nous servirons de l’Intelligence comme d’exemple pour approfondir la connaissance des choses dont nous nous occupons.

XX. Supposons donc l’Intelligence dans un état tel qu’elle ne s’attache encore à rien de particulier, qu’elle ne s’applique à rien, afin de ne pas devenir une intelligence particulière ; concevons-la semblable à la science prise en soi avant les notions des espèces particulières, ou bien encore à la science d’une espèce prise avant les notions des parties qu’elle contient. La science universelle, sans être [en acte] aucune notion particulière, est en puissance toutes les notions, et réciproquement, chaque notion

  1. μήπω νοῦν εἶναι (mêpô noun einai). Kirchhoff a retranché ici, et sans en donner le motif, l’adverbe μήπω (mêpô), qui se trouve dans les éditions, et que Ficin a traduit : Nondum tamen intellectum.