Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/297

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
236
SIXIÈME ENNÉADE.


table est en effet l’Être avec toutes choses ; elle est par conséquent tous les êtres. Quant à l’Être considéré seul, il constitue un genre et est un élément de l’Intelligence.

Enfin, la justice, la tempérance et en général toutes les vertus sont autant d’actes de l’Intelligence. Elles ne sauraient donc figurer parmi les genres premiers. Elles sont postérieures à un genre[1] et constituent des espèces.

XIX. Puisque ces quatre choses [qui complètent l’essence[2], savoir, le mouvement, la stabilité, l’identité et la différence] constituent [avec l’Être] les genres premiers, il reste à examiner si chacun d’eux pris à part engendre des espèces, si, par exemple, l’Être pris en lui-même pourrait admettre des divisions dans lesquelles les autres genres n’entreraient pour rien. — Non, sans doute : car, pour engendrer des espèces, il faut que le genre admette des différences venues du dehors ; que ces différences soient des propriétés appartenant à l’Être en tant qu’être, sans être cependant lui-même. Mais alors d’où l’Être les tient-il ? Ce ne peut être assurément de ce qui n’existe pas. Si c’est nécessairement de ce qui existe, comme il ne reste que trois genres d’êtres, il est évident que l’Être tient ses différences de ces genres, qui s’associent à lui et ont une existence simultanée. Mais par cela même que ces genres ont une existence simultanée [avec l’Être], ils servent à le constituer, puisqu’il se compose de tous ces éléments réunis. Comment alors peuvent-ils être autres que le tout qu’ils constituent ? Comment ces genres font-ils de tous les êtres des espèces ? Comment par exemple le mouvement pur peut-il former des espèces du mouvement ? La stabilité et les autres genres donnent lieu aux mêmes questions. Il faut

  1. Nous lisons avec Ficin ὕστερα γένους (hustera genous), au lieu de γένος (genos), que donnent les manuscrits, mais qui n’offre pas de sens satisfaisant, comme Creuzer le reconnaît dans ses notes.
  2. Voy. ci-dessus le début du § 15, p. 231.