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LIVRE TROISIÈME.


sés [comme les mixtes], doivent être ramenés à un seul genre ainsi que leurs accidents et leurs effets, en établissant des divisions entre ces choses. — On peut encore distinguer dans les corps, d’un côté la matière, de l’autre la forme imprimée à la matière, et faire un genre de chacune d’elles prise séparément, ou bien les réunir toutes deux dans un même genre, en les appelant, par homonymie, essence, ou plutôt génération. Mais que peut-il y avoir de commun entre la matière et la forme ? Comment en outre la matière serait-elle un genre et que comprendrait ce genre ? La matière n’est-elle pas en effet partout la même ? Et d’ailleurs, dans quel genre placerons-nous le composé qui résulte de l’union de la forme et de la matière ? Si nous disons que ce composé même est l’essence corporelle, mais qu’aucun de ses éléments n’est corps, comment ceux-ci seraient-ils rangés dans la même catégorie que le composé ? Vit-on jamais placer dans le même genre les éléments d’une chose et cette chose même ? Si l’on répond qu’il faut commencer par les corps [par les composés], c’est comme si l’on nous disait que dans la lecture il faut commencer par les syllabes [et non par les lettres].

Mais si l’on ne peut établir dans le monde sensible des divisions qui soient absolument les mêmes que celles du monde intelligible, pourquoi n’y admettrions-nous pas des divisions analogues ? Au lieu de l’être intelligible, nous aurons ici-bas la matière ; au lieu du mouvement intelligible, la forme, qui donne à la matière la vie et la perfection ; au lieu de la stabilité intelligible, l’inertie de la matière ; au lieu de l’identité, la ressemblance ; au lieu de la différence, la diversité ou plutôt la dissemblance qu’offrent les êtres sensibles[1]. Soit : mais remarquons d’abord que la matière

  1. Pour la définition des genres de l’être intelligible, savoir, l’être, le mouvement, le repos ou la stabilité, l’identité, la différence, Voy. ci-dessus liv. II, § 7-8, p. 214-219.