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LIVRE TROISIÈME.

pourra-t-il le recevoir ? Est-ce dans le mobile ? Pourquoi ne demeure-t-il pas en lui ? Il faut donc que le mouvement ne soit pas séparé du moteur sans cependant être en lui seul, qu’il passe du moteur dans le mobile sans cesser d’être lié au premier, qu’il aille du moteur au mobile, qu’il en soit comme l’influx (πνοή (pnoê))[1]. Quand la puissance motrice produit la locomotion, elle nous donne une impulsion et nous fait changer sans cesse de place ; quand elle est calorifique, elle échauffe ; quand, rencontrant une matière, elle lui donne son organisation naturelle, elle produit l’accroissement ; quand elle ôte quelque chose à un objet, cet objet décroît parce qu’il est capable de décroître ; enfin, quand c’est la puissance générative qui entre en action, il y a génération ; mais si celle-ci est moins forte que la puissance capable de détruire, il y a destruction, non de ce qui est produit déjà, mais de ce qui se produisait. De même, il y a convalescence dès que la force capable de produire la santé agit et domine ; maladie, quand la puissance opposée produit un effet contraire. Il en résulte que le mouvement doit être étudié non-seulement dans les choses où il est produit, mais encore dans celles qui le produisent ou le transmettent ; il en résulte encore que la propriété du mouvement consiste à être un mouvement doué de telle ou telle qualité, et à être tel ou tel dans tel ou tel objet.

XXIV. Quand il s’agit du mouvement de déplacement, on

  1. C’est une idée empruntée à Aristote : « Il est clair que le mouvement existe dans l’objet mobile : car le mouvement est l’actualité de l’objet mobile produite par le moteur. De plus, l’actualité du moteur ne diffère pas de l’actualité du mobile. Il faut, pour qu’il y ait mouvement, qu’il y ait actualité de l’un ou de l’autre. Or, la puissance du moteur, c’est le principe du mouvement ; son actualité, c’est ce principe produisant le mouvement : mais ce mouvement, c’est l’actualité même de l’objet mobile. Il n’y a donc qu’une actualité unique pour l’un et pour l’autre. » (Aristote, Métaphysique, liv. XI, chap. 9 ; trad. fr., t. II, p. 185.)