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LIVRE QUATRIÈME.

l’être qu’on nomme grand est petit, l’être qu’on regarde comme petit est grand, puisqu’il pénètre tout entier dans chaque partie tout entière[1] ; ou plutôt notre monde, s’approchant partout par ses parties de l’Être universel, le trouve partout tout entier et plus grand que lui-même[2]. Aussi, comme il ne recevrait rien de plus par une plus grande extension (car il se mettrait par là hors de l’Être universel, si c’était possible), il a voulu se mouvoir autour de cet être ; ne pouvant ni l’embrasser ni pénétrer en son sein, il s’est contenté d’occuper un lieu et d’avoir une place où il conservât l’existence en approchant de l’Être universel, qui lui est présent en un sens et ne lui est pas présent en autre sens : car l’Être universel est en lui-même, lors même que quelque chose veut s’unir à lui. S’approchant donc de lui, le corps de l’univers trouve l’Être universel ; n’ayant pas besoin d’aller plus loin, il tourne autour de la même chose parce que la chose autour de laquelle il tourne est l’Être véritablement universel, en sorte que par toutes ses parties il jouit de la présence de cet Être tout entier[3]. Si l’Être universel était dans un lieu, notre monde devrait

    tanta quanta per totum. Qualités vero corporis, quæ sanitas dicitur, quum sanam corpus est totum, tanta est in majoribus quanta in minoribus partibus ; non enim quæ minus magnæ sunt, ideo minus sanæ sunt, aut quæ ampliores ideo saniores. Absit ergo ut quod potest in corpore qualitas creati corporis, non possit in seipsa substantia Creatoris. » (Lettre clxxxvii, § 13.)

  1. Nous lisons avec M. Kirchhoff ἐπὶ πᾶν τούτου μέρος (epi pan toutou meros) au lieu de ἐπὶ πᾶν τὸ τοῦ μέρους (epi pan to tou merous).
  2. Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § lxxxvii ; t. I, p. lxxxviii.
  3. Voy. Enn. II, liv. II, § 2 ; t. I, p. 161. Ce passage de Plotin est cité par le P. Thomassin, qui ajoute : « Sic ille rationem assignat cur mundus circulari, non recto agatur motu : quum enim Deum jam attigerit, in eoque totus sit, non debet ultra progredi ; sed eodem in loco circulari, ut non se toto tantum, sed et singulis sui partibus ubique esse studeat, Deoque quiubique est perfrui. » (Dogmata theologica, t. I, p. 249.)