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SOMMAIRES.


(II-III) Puisque l’être est à la fois un et multiple, il renferme nécessairement plusieurs éléments constitutifs dont l’ensemble forme la substance du monde intelligible, substance que nous nommons l’être. Ces éléments constitutifs sont à la fois des principes, parce qu’ils constituent la totalité de l’être, et des genres, parce que chacun d’eux contient sous lui des espèces subordonnées les unes aux autres. La pluralité des éléments qui se trouvent dans l’être n’étant pas contingente, elle suppose l’Un absolu dont elle procède. Si les genres premiers se ramènent ainsi à l’Un, ce n’est pas que celui-ci s’affirme d’eux comme prédicat ; c’est que tous ensemble ils sont éléments intégrants d’une seule substance dans laquelle notre pensée établit des divisions.

(IV-V) Il est facile de comprendre comment, dans les corps, l’unité renferme une pluralité, d’y distinguer la qualité, la quantité, la substance. Mais en étudiant les genres et les principes de l’essence intelligible, il faut faire abstraction de toute quantité, de toute matière sensible, pour saisir la réalité et l’unité de l’être, Dans les corps, les principes sont séparés ; ici ils ne sont que distincts. Il n’est donc pas aisé de comprendre comment la substance intelligible, qui est une, peut être à la fois une et multiple. Comme les corps renferment une pluralité et une diversité d’éléments très-grande, ils ne reçoivent pas immédiatement de l’Un absolu l’unité qui tient leurs parties jointes et en fait un tout ; ils sont formés par l’Âme. Celle-ci doit donc être unité-pluralité. Cette pluralité consiste dans les raisons séminales qui sont l’acte et l’essence de l’âme ; elle résulte aussi de ce que l’essence de l’âme contient plusieurs puissances.

(VI) Dans l’âme, l’essence est le principe de tout ce qu’elle est, ou plutôt l’essence est tout ce qu’est l’âme ; elle est par conséquent la vie. L’essence et la vie de l’âme forment une unité ; mais cette unité se fait multiple relativement aux autres êtres, dès qu’elle développe ses puissances, et qu’elle essaie de se contempler.

(VII) Puisqu’il y a dans l’âme essence et vie, que la vie consiste dans l’intelligence et implique mouvement, il y a là deux genres, l’Être et le Mouvement. Mais l’Être implique la Stabilité encore plus que le mouvement ; il faut donc faire d’elle un genre distinct.

(VIII) On découvre également ces genres en considérant l’Intelligence. Elle pense, voilà le Mouvement ; elle pense ce qui est en elle, voilà l’Être. L’Être est le terme auquel aboutit la pensée, voilà la Stabilité. En distinguant ces trois genres par la pensée, on voit que chacun d’eux existe à part : c’est la Différence. En les considérant réunis en une seule existence, on les ramène à être une même chose : c’est l’Identité. Tels sont les cinq genres des choses intelligibles.

(IX-XI) Reste à prouver qu’il n’y a que ces cinq genres premiers.

L’Un n’est pas un genre premier. — L’Un absolu, supérieur à l’Être et à l’Intelligence, ne forme pas un genre, parce qu’il ne s’affirme d’aucune chose, et que, par suite de sa simplicité, il ne renferme pas de différences qui puissent engendrer des espèces.

L’unité considérée dans l’Être n’est pas l’un premier, puisqu’il y a au-dessus d’elle l’Un absolu ; elle ne peut donc être un genre premier. L’Un absolu est le principe de l’Être. L’unité, considérée comme attribut qui s’adjoint à l’Être, le