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LIVRE QUATRIÈME.

Mais ce qui est engendré [c’est-à-dire le corps] s’approche de l’Âme, paraît s’unir à elle et dépend d’elle.

Et nous, que sommes-nous ? Sommes-nous l’Âme universelle, ou bien ce qui s’approche d’elle et qui est engendré dans le temps [c’est-à-dire le corps] ? — Non [nous ne sommes pas des corps]. Avant que la génération [des corps] fût opérée, nous existions déjà là-haut, nous étions les uns des hommes, les autres même des dieux, c’est-à-dire nous étions des âmes pures, des intelligences suspendues à l’Essence universelle ; nous formions des parties du monde intelligible, parties qui n’étaient pas circonscrites ni séparées, mais qui appartenaient au monde intelligible tout entier. Maintenant même, en effet, nous ne sommes pas séparés du monde intelligible[1] ; mais à l’homme intelligible s’est joint en nous un homme qui a voulu être autre que lui [c’est-à-dire l’homme sensible qui a voulu être indépendant[2]], et nous trouvant (car nous n’étions pas hors de l’univers), il nous a entourés et s’est ajouté à l’homme intelligible qui était alors chacun de nous[3]. Supposez un seul son, une seule parole : ceux qui lui

  1. L’âme humaine, selon Plotin, reste toujours attachée au monde intelligible par sa partie supérieure. Voy. Enn. IV, liv. VIII, § 8 ; t. II, p. 492.
  2. Voy. ci-dessus Enn. V, liv. I, § 1, p. 3.
  3. Ficin commente cette phrase en ces termes : « Has animas quasi colleges una cum Mente regina ac duce mundi Anima conspirantes appellamus vitæ mundum. Sunt autem magis unitæ desuper, ubi per intellectualem proprietatem intelligibili mundo, id est Menti divinæ, velut centro, cunctæ prorsus incumbunt. Magis vero disjunctæ invicem deinceps evadunt, ubi proprietatem rationalem magis explicant ; atque mox, per vegetalem jam regnantem, ad gignendum animal se deflectunt. Ex mundo vitæ, qui totus una cum omnibus suis animis semper est ubique, alia corpora alias atque aliter vitas animasque suscipiunt : quemadmodum et ab Anima mundi quotidie varia corpora, et a qualibet anima propria simiiiter differentia membra vires actionesque alias aliter que percipiunt. »