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LIVRE SIXIÈME.

quantitatif. Si elle n’est point un simple quantitatif, elle est infinie en nombre ; mais infini se prend alors dans un autre sens que celui de n’avoir point de limites qu’on ne puisse dépasser. — En quel sens se prend donc ici le terme d’infini ? — En ce sens que la conception d’une limite n’est pas impliquée dans l’essence de la ligne en soi.

Qu’est donc la ligne intelligible, et où existe-t-elle ? — Elle est postérieure au nombre[1] : car l’unité apparaît dans la ligne, puisque celle-ci part de l’unité [du point] et qu’elle a une seule dimension [la longueur] ; or la mesure de la dimension n’est point un quantitatif. — Où la ligne intelligible existe-t-elle donc ? — Elle n’existe que dans l’intelligence qui la définit ; ou bien, si elle est une chose, elle n’est qu’une chose intellectuelle. Dans le monde intelligible, en effet, tout est intellectuel et tel que la chose est elle-même. Dans ce même monde est également déterminé où et de quelle manière sont placés le plan, le solide, ainsi que toutes les figures : car ce n’est pas nous qui créons les

    que du fini, en vue seulement de la démonstration ; elle ne considère pas l’infini par rapport à l’infini lui-même, mais par rapport au fini. En effet, si vous n’accordiez, ni que le point donné fût placé dans la direction de la droite, supposée limitée, ni qu’il en fût éloigné de telle manière que quelqu’une des parties de la droite se trouvât située au-dessous du point, la science n’aurait plus que faire de l’infini. C’est donc afin qu’en employant la ligne finie, elle le fasse d’une manière irréprochable et inattaquable, que la science suppose l’existence de l’infini, profitant ainsi de l’indétermination qui est le domaine de l’imagination en même temps que le fondement de la génération de l’infini. » (Proclus, Commentaire d’Euclide, éd. de Bâle, p. 76.)

  1. Voy. la démonstration de ce point dans Macrobe, qui conclut en ces termes : « Ex his apparet antiquiorem esse numerum superfide et lineis, ex quibus illam constare memoravimus, formisque omnibus. A lineis enim ascenditur ad numerum tanquam ad priorem, ut intelligatur ex diversis numeris linearum quæ formæ geometricæ describantur. » (Commentaire du Songe de Scipion, liv. I, chap. 5.)