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LIVRE SEPTIÈME.
DE LA MULTITUDE DES IDÉES. DU BIEN.[1]

I. Lorsque Dieu même ou un dieu inférieur envoya les âmes dans la génération, il donna au visage de l’homme des yeux destinés à l’éclairer[2], il plaça dans le corps les autres organes propres aux sens, prévoyant (προορώμενος (proorômenos)) que l’animal ne pourrait se conserver qu’à la condition de voir les objets placés devant lui, de les entendre et de les toucher, afin de rechercher les uns et d’éviter les autres. Mais comment Dieu le prévit-il ? — Il ne faut pas croire qu’il ait commencé par faire des animaux qui aient péri faute de posséder des sens, et qu’ensuite il en ait donné aux hommes et aux autres animaux afin qu’ils pussent se préserver de la mort[3].

On fera peut-être l’objection suivante : Dieu savait que les animaux seraient exposés au chaud, au froid et aux autres impressions physiques ; par suite de cette connaissance, pour empêcher les animaux de périr, il leur a accordé les sens et les organes destinés à leur servir d’instruments. —

  1. Ce livre comprend deux parties : 1° De la multitude des Idées, § 1-14 ; 2° Du Bien, § 15-42. Pour les autres Remarques générales, Voy. les Éclaircissements sur ce livre à la fin du volume.
  2. Dans ce début, Plotin résume la doctrine exposée dans le Timée au sujet de la Providence divine, doctrine dont il présente ensuite l’interprétation d’après son propre système. Voici le passage auquel il fait ici particulièrement allusion : « Avant tous les autres organes, les dieux formèrent les yeux, porteurs de la lumière, etc. » (Platon, Timée, p. 45 ; trad. de M. H. Martin, p. 123.)
  3. Sur la manière dont s’exerce la Providence divine, Voy. le livre II de l’Ennéade III.