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SIXIÈME ENNÉADE.

doués de raison se trouvent en elle ; mais cette multitude d’êtres privés de raison a-t-elle rien de vénérable ? Ne semble-t-elle pas plutôt quelque chose de messéant à l’Intelligence divine ? — Évidemment l’Être qui est un doit être aussi multiple, puisqu’il est postérieur à l’Un absolument simple ; sinon, au lieu de lui être inférieur, il se confondrait avec lui. Étant postérieur à l’Un, il ne saurait être plus simple, il l’est donc moins. Or Celui qui est excellent étant l’Un, l’Être devait être plus d’un, puisque la multiplicité est le caractère de l’infériorité. — Pourquoi donc l’Être ne serait-il pas Dyade seulement ? — C’est que chacun des deux éléments de la Dyade ne peut non plus être absolument un, et doit être au moins Dyade ; il en est de même de chacun des nouveaux éléments [dans lesquels se décomposeraient les premiers éléments de la Dyade]. En outre, la première Dyade renferme à la fois Mouvement et Stabilité[1] ; elle est aussi Intelligence et Vie parfaite. L’Intelligence a pour caractère non d’être une, mais d’être universelle : elle renferme donc toutes les intelligences particulières ; elle est toutes les intelligences et en même temps elle est quelque chose de plus grand. Elle possède la vie non comme Âme une, mais comme Âme universelle, ayant la puissance supérieure de produire les âmes particulières. Elle est enfin l’Animal universel ; par conséquent, elle ne doit pas renfermer l’homme seul [mais encore toutes les autres espèces d’animaux] ; sinon, l’homme seul existerait sur la terre.

IX. Admettons, dira-t-on, que l’Intelligence renferme les idées des animaux d’un ordre relevé. Mais comment se fait-il qu’elle renferme aussi les idées des animaux vils et privés de raison ? Car on doit regarder comme vil tout animal privé de raison et d’intelligence, puisque c’est à ces facultés que celui qui les possède doit sa noblesse. — Sans doute

  1. Voy. ci-dessus, liv. II, § 7, p. 215.