C’est donc évidemment au principe immatériel qu’appartient la liberté et qu’il faut rapporter notre libre arbitre. Ce principe, c’est la volonté qui est maîtresse d’elle-même et qui demeure en elle-même : car si elle prend quelque résolution relative aux choses extérieures, elle ne le fait que par nécessité. Tout ce qui procède d’elle et existe par elle dépend de nous et est libre ; ce qu’elle veut et qu’elle fait sans obstacle, soit en elle, soit hors d’elle, voilà ce qui dépend de nous au premier degré. L’intelligence contemplative et première possède donc l’indépendance (το τὸ ἐφ'ἑαυτῳ (to eph’heautô)), parce que dans l’accomplissement de sa fonction elle ne dépend nullement d’un autre être, parce qu’en la remplissant elle reste tout entière tournée vers elle-même, qu’elle ne s’occupe que d’elle, qu’elle se repose dans le bien, et que satisfaite, sans besoin, elle vit selon sa volonté. La volonté d’ailleurs n’est que la pensée ; mais elle a été nommée volonté parce qu’elle est conforme à l’intelligence[1] : car la volonté imite ce qui est conforme à l’intelligence. D’un côté, la volonté désire le bien ; de l’autre, pour l’intelligence, penser véritablement, c’est être dans le bien. L’intelligence possède donc ce que désire la volonté, et dès que celle-ci l’a atteint, elle devient par là même pensée. Ainsi, puisque nous attribuons la liberté à la volonté du bien, comment ne raccorderions-nous pas à l’intelligence qui est édifiée dans ce que désire la volonté ? Si l’on refuse à l’intelligence la liberté, ce ne peut être que pour lui reconnaître quelque chose de plus élevé encore.
VII. C’est donc par la vertu de l’intelligence que l’âme est libre, quand elle s’élève au bien sans rencontrer d’obstacle ; tout ce qu’elle fait pour y arriver dépend d’elle. Quant à l’intelligence, elle est libre par elle-même.