Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/616

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
555
LIVRE NEUVIÈME.

le centre de l’âme est-il donc le principe que nous cherchons ? ou bien faut-il concevoir un autre principe vers lequel tous les centres concourent ?

Remarquons d’abord que ce n’est que par analogie qu’on emploie les mots de centre et de cercle : en disant que l’âme est un cercle, on n’entend pas qu’elle soit une figure de géométrie, mais qu’en elle et autour d’elle subsiste la nature primordiale[1] ; [en disant qu’elle a un centre, on entend que] l’âme est suspendue au Premier principe [par la partie la plus élevée de son être], surtout lorsqu’elle est tout entière séparée [du corps], Et maintenant, comme nous avons une partie de notre être enfermée dans le corps, nous ressemblons à un homme qui aurait les pieds plongés dans l’eau et le reste du corps placé au-dessus de l’eau : nous élevant au-dessus du corps par toute la partie qui n’est pas immergée, nous nous rattachons par le centre de nous-mêmes au centre commun de tous les êtres, de la même façon que nous faisons coïncider les centres des grands cercles avec celui de la sphère qui les entoure. Si les cercles de l’âme étaient corporels[2], il faudrait que le centre commun occupât un certain lieu pour qu’ils coïncidassent avec lui et qu’ils tournassent autour de lui. Mais puisque les âmes sont de l’ordre des essences Intelligibles et que l’Un est encore au-dessus de l’Intelligence, il faut admettre que l’union de l’âme et de l’Un (συναφὴ (sunaphê)) s’opère ici par d’autres moyens que ceux par lesquels l’Intelligence s’unit à l’intelligible[3]. Cette union est en effet beaucoup plus étroite que

  1. C’est la matière. Voy. Enn. I, liv. VIII, § 7 ; t. I, p. 128, note 1.
  2. Voy. les Éclaircissements, de notre tome I, p. 453.
  3. Le P. Thomassin commente ce morceau en ces termes : « Dum anima Deum cognoscit, Deo fit præsens ; quumque Deo præsentia sint omnia, fit et omnibus præsens, Deum enim cognoscit anima non per scientiam, sed per præsentiam ; non per intellectum, sed per contactum ; uno suo, quod mente superius est, Unum mente superius attingit, sicque non intelligendo, sed tangendo,