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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/94

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LIVRE TROISIÈME.


la raison à l’intelligence, et nous examinerons en quoi consiste la connaissance de soi-même. Enfin, si nous attribuons cette connaissance à la fois à l’intelligence inférieure et à l’intelligence supérieure, nous aurons à établir les différences qu’offre la connaissance de soi-même selon qu’elle appartient à l’une ou à l’autre : car, s’il n’y avait pas de différence entre ces deux espèces d’intelligence, la raison discursive serait identique à l’intelligence pure. La raison discursive se tourne-t-elle donc vers elle-même ? ou bien se borne-t-elle à avoir la compréhension des formes qu’elle reçoit des sens et de l’intelligence, et dans ce second cas, comment en a-t-elle la compréhension ? C’est ce dernier point que nous allons commencer par examiner.

III. Le sens a vu un homme et en a fourni l’image à la raison discursive. Que dit celle-ci ? Il peut se faire qu’elle ne prononce rien et qu’elle se borne à en prendre connaissance. Il peut arriver aussi qu’elle se demande quel est cet homme, et que, l’ayant déjà rencontré, elle prononce, avec le secours de la mémoire, que c’est Socrate. Si elle développe l’image de Socrate, alors elle divise ce que lui fournit l’imagination. Si elle ajoute que Socrate est bon, elle parle encore des choses connues par les sens, mais ce qu’elle en affirme, savoir la bonté, elle le tire d’elle-même, parce qu’elle a en elle-même la règle du bien. Mais comment a-t-elle en elle-même le bien ? C’est qu’elle est conforme au bien, et qu’elle en reçoit la notion de l’intelligence qui l’illumine : car cette partie de l’âme [la raison discursive] est pure et reçoit des impressions de l’intelligence[1].

  1. On peut rapprocher de ces lignes le morceau suivant d’Olympiodore : « Si notre âme prononce que telle chose est plus belle et telle autre moins belle, il est évident qu’elle juge par rapport à quelque modèle, à quelque idée. L’école péripatéticienne répond que c’est là précisément la vertu de notre faculté de juger ; mais notre âme ne juge pas naturellement sans principes ; elle n’agit pas comme l’araignée qui tire sa toile d’elle-même. S’il est vrai