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Page:Plutarque - Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 1, 1870.djvu/707

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réduits à une situation si peu digne de notre naissance, nous ne reculons point devant la mort ; et tout sera meilleur à a mes yeux que de passer, si vous ne pouvez y mettre obstacle, une nuit pareille à la précédente. » Les plus sensibles de l’assistance[1] fondirent en larmes ; mais pour Alexandre, il ne songea pas à plaindre une femme qui lui semblait si fort au-dessus de la pitié. Ce fut de l’admiration que lui inspirèrent et cette vertu et ces paroles qui l’accusaient puissamment lui-même. Il donna ordre à ses officiers de veiller sur elle et de prendre des précautions pour que des excès aussi injurieux ne fussent pas commis de nouveau contre une illustre maison. Quant à Timoclée, il la renvoya libre, elle et tous ceux qui furent reconnus lui appartenir à titre de parenté.

ERYXO.

Battus, surnommé l’Heureux, eut pour fils Arcésilaüs, qui sous le rapport des mœurs ne rappelait en rien son père. Car Battus,de son vivant, l’avait condamné à un talent d’amende parce qu’il avait fait entourer sa demeure de créneaux. Après la mort de son père, cet Arcésilaüs, obéissant à une férocité naturelle qui lui valut même son surnom, et de plus aux conseils d’un méchant ami, nommé Laarque, devint un tyran au lieu d’être un roi. Laarque, qui lui-même aspirait traitreusement au pouvoir, provoquait l’exil ou la mort des principaux Cyrénéens et multipliait les griefs accumulés contre Arcésilaüs. Il finit, en lui donnant à manger du lièvre marin, par le faire tomber dans une maladie de langueur qui devint mortelle. Quand Arcesilaüs fut expiré, il prit le pouvoir sous prétexte de le conserver à Batius, fils du prince. En raison de son bas âge et d’une infirmité qui le rendait boiteux, l’enfant était méprisé. Mais un grand nombre de citoyens s’intéressaient à la mère, femme d’une haute sagesse, d’une grande humanité, et qui tenait à des familles nombreuses et puissantes. Aussi Laarque,

  1. Amyot : « Tous les gents d’honneur qui furent là présent se prirent a plorer. »