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Page:Plutarque - Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 1, 1870.djvu/82

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SUR L’ÉDUCATION

Au contact d’enfants de pays étranger et ayant de mauvaises habitudes, les nôtres prendraient quelque chose de ces vices ; et le proverbe n’est pas sans justesse, qui dit : « À vivre avec un boiteux on apprend à boiter ».

[7] Quand les enfants auront atteint l’âge où on les place entre les mains des pédagogues, ce sera alors qu’il faudra apporter une grande sollicitude à l’installation de ces directeurs[1], pour n’aller pas, sans le savoir, livrer les jeunes élèves à des esclaves, ou bien à des hommes de pays barbares, ou, encore, à des étrangers qui tournent à tout vent[2]. Car ce qui arrive en général est le comble du ridicule. A-t-on des serviteurs de mérite ; on fait les uns laboureurs de ses terres, les autres, patrons de ses navires ; ceux-ci, intendants, ceux-là négociants et banquiers pour son compte ; mais se trouve-t-on avoir un esclave qui se laisse prendre de vin, qui soit gourmand, incapable de toute occupation sérieuse ; c’est à lui que l’on va livrer ses enfants. Or un bon précepteur doit avoir une nature qui rappelle celle de Phénix, le gouverneur d’Achille. Une recommandation, la plus grande et la plus essentielle de toutes, est celle que je vais maintenant énoncer. Il faut pour les enfants rechercher des instituteurs dont la vie ne donne pas sujet à la moindre attaque, dans les mœurs de qui il n’y ait rien à reprendre, et qui aient un grand fonds de sagesse, dû à leur expérience. La source, la racine de toute probité, de toute vertu, c’est une éducation convenable ; et de même que les cultivateurs mettent des palissades au pied des plantes, de même les bons maîtres entourent leurs jeunes élèves de l’appui de principes solides et d’utiles conseils, qui permettent chez eux le développement d’une saine moralité. Au contraire, comment ne pas conspuer certains pères qui, avant d’avoir fait l’essai des maîtres futurs de leurs enfants, remettent ceux-ci, soit par négligence, soit par ignorance, aux mains d’hommes sans honneur et décriés[3] ! Et encore,

  1. Peut-être : « apporter une grande sollicitude à ce que sont ces directeurs ».
  2. Peut-être : « qui changent souvent de place » ?
  3. Tacite, Dialogue des orateurs, ch. XXIX. L’analogie des deux passages est frappante.