Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 11.djvu/136

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lignes et leurs retranchements. César courut au-devant des fuyards, pour les ramener au combat ; et voyant ses efforts inutiles, il saisit les drapeaux des enseignes, afin de les arrêter ; mais ils les jetaient à terre, et trente-deux tombèrent au pouvoir de l’ennemi. César lui-même manqua d’y périr ; il avait voulu retenir un soldat, grand et robuste, qui fuyait comme les autres, et l’obliger de faire face à l’ennemi : cet homme, troublé par le danger, et hors de lui-même, leva l’épée pour le frapper ; mais l’écuyer de César le prévint, et d’un coup d’épée il lui abattit l’épaule. César croyait déjà tout perdu ; et lorsque Pompée, ou par un excès de précaution, ou par un caprice de la fortune, eut manqué de conduire à son terme un si heureux commencement ; que, satisfait d’avoir obligé les fuyards de se renfermer dans leur camp, il se fut retiré, César, en s’en retournant, dit à ses amis : « La victoire était aujourd’hui assurée aux ennemis, si leur chef avait su vaincre. » Après être rentré dans sa tente, il se coucha, et passa la nuit dans la plus cruelle inquiétude, livré à de tristes réflexions ; il se reprochait la faute qu’il avait faite, lorsque, ayant devant lui un pays abondant, et les villes opulentes de la Macédoine et de la Thessalie, au lieu d’attirer la guerre dans ces belles contrées, il s’était