Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 3.djvu/368

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laisserait aucun espoir de salut. Alcibiade, qui était bien informé de tout, envoya secrètement à Samos vers les principaux Athéniens, et leur fit espérer qu’il leur ménagerait l’amitié de Tisapherne, non, disait-il, dans la vue de faire plaisir au peuple, à qui il ne se fiait pas, mais pour favoriser les nobles, si toutefois ils osaient agir en gens de cœur pour réprimer l’insolence de la multitude, et sauver la patrie en se rendant maîtres des affaires.

XXXII. Ils écoutèrent volontiers ses propositions ; le seul Phrynichus, du bourg de Dirades, l’un des généraux, soupçonna, ce qui était vrai, qu’Alcibiade, aussi indifférent pour l’oligarchie que pour la démocratie, voulait seulement, à quelque prix que ce fût, obtenir son rappel ; et, en calomniant le peuple, flatter la noblesse et s’insinuer dans ses bonnes grâces. Il s’opposa donc à ce qu’on proposait ; mais, son avis n’ayant pas prévalu, et sentant bien que par son opposition il s’était fait d’Alcibiade un ennemi déclaré, il fit dire sous main à Astyochus, amiral de la flotte ennemie, de se défier d’Alcibiade, et de le faire arrêter comme trahissant les deux partis. Il ne se doutait pas que, traître, il s’adressait à un autre traître. Astyochus, qui faisait la cour à Tisapherne, et qui voyait dans quel crédit Alcibiade