Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 5.djvu/335

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mérite à être bon mari que grand sénateur. Il n’admirait rien tant dans Socrate que la douceur et la complaisance qu’il avait toujours conservées avec une femme acariâtre et des enfants emportés. Lorsqu’il eut un fils, jamais l’affaire la plus pressée, à moins qu’elle ne regardât la république, ne l’empêcha d’être auprès de sa femme quand elle lavait et emmaillotait son enfant. Elle le nourrissait de son lait ; souvent même elle donnait le sein aux enfants de ses esclaves, afin que, nourris du même lait, ils conçussent pour son fils une bienveillance naturelle.

XXX. Dès que ce fils eut atteint l’âge de raison, il le prit auprès de lui pour l’instruire dans les lettres, quoiqu’il eût un esclave honnête, nommé Chilon, qui était bon grammairien, et qui enseignait plusieurs enfants. Il ne voulait pas, dit-il lui-même, qu’un esclave fît des réprimandes à son fils, qu’il lui tirât les oreilles, pour avoir été trop lent à apprendre, ni que son fils dût à un mercenaire un aussi grand bien que celui de l’éducation. Il fut donc lui-même le maître de grammaire du jeune Caton, son guide dans l’étude des lois, et son maître d’exercice. Il lui enseigna non seulement à lancer le javelot, à combattre tout armé, à monter à cheval ; mais encore à s’exercer au pugilat, à supporter le froid et le chaud, à traverser