Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/473

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Il n’était bruit partout que des chevaux qu’élevait Alcibiade, et du grand nombre de ses chars. Nul autre avant lui, ni particulier, ni roi même, n’avait envoyé sept chars à la fois aux jeux Olympiques ; et là, il remporta le premier, le second prix, et le quatrième, selon Thucydide[1], ou, suivant Euripide, le troisième : victoires qui effacent ce qu’il y a de plus magnifique et de plus glorieux en ce genre de hauts faits. Voici ce que dit Euripide, dans le chant en l’honneur d’Alcibiade[2] :

Je te chanterai, ô fils de Clinias. C’est noble chose que la victoire. Mais, de tous les exploits le plus beau, celui que jamais Grec n’égala, c’est d’avoir gagné le premier prix de la course des chars, et le second, et le troisième ; c’est d’avoir deux fois, sans effort, conquis la couronne d’olivier, et deux fois fait retentir la voix du héraut.

Mais ce qui releva encore l’éclat de ces victoires, ce fut la munificence dont il fut l’objet de la part des villes : les Éphésiens lui dressèrent une tente, magnifiquement ornée ; ceux de Chios nourrirent ses chevaux, et lui fournirent un grand nombre de victimes ; les Lesbiens lui donnèrent le vin, et firent les frais de sa table, ouverte à tout le monde. Il est vrai que la calomnie et la mauvaise foi répandirent, au sujet des moyens dont il usait pour satisfaire son ambition de vaincre, certains propos fâcheux. Il y avait, dit-on, un Athénien nommé Diomède, homme de bien et ami d’Alcibiade, qui désirait passionnément remporter le prix aux jeux Olympiques : ayant appris que les Argiens avaient un très-beau char, qui appartenait au public, et sachant tout le crédit et le grand nombre d’amis qu’Alcibiade avait dans Argos, il le pria de lui acheter ce char. Alcibiade l’acheta, et se l’attribua à lui-même, sans se mettre en peine de ce que

  1. Au chapitre XVI de son sixième livre.
  2. Ce chant n’existe plus.