Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/518

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bat, on les vit à Rome, sur leurs chevaux couverts de sueur, et qu’ils annoncèrent la victoire dans le Forum, près de la fontaine, à l’endroit où s’élève encore aujourd’hui leur temple. C’est pour cela que le jour des ides du mois de juillet[1], anniversaire de cette victoire, a été consacré aux Dioscures.

Les lueurs passagères d’une réputation prématurée suffisent pour éteindre le désir de la gloire dans le cœur des jeunes gens médiocrement passionnés pour elle : c’en est assez pour apaiser en eux une soif facile à satisfaire. Mais une pensée forte et généreuse grandit, au contraire, par l’effet même des honneurs, et elle s’embrase d’un plus vif éclat. C’est comme un vent rapide, qui pousse l’homme vers tout ce qui se montre beau ; la récompense de ce qu’il a fait semble lui prescrire l’engagement de mieux faire à l’avenir ; et il aurait honte de trahir sa gloire, en ne la surpassant pas par de plus grands exploits. Tel était Marcius. Rival de lui-même, il s’efforça d’être, pour ainsi dire, chaque jour un nouvel homme ; il ajouta sans cesse à ses belles actions des actions plus belles encore : il entassa dépouilles sur dépouilles ; il vit les derniers généraux sous lesquels il servait lui décerner, à l’envi de ses anciens chefs, d’honorables récompenses, et rendre à sa vaillance des témoignages plus magnifiques encore. Les Romains avaient alors à livrer bien des combats, à soutenir bien des guerres : il n’y eut pas une seule de ces occasions, d’où Marcius revint sans quelque couronne ou quelque prix d’honneur. La gloire était, pour les autres, la fin de la vertu ; mais ce que Marcius cherchait dans la gloire, c’était la joie qu’en ressentait sa mère. Que sa mère entendît les louanges qu’on lui donnait ; qu’elle le vît recevoir des couronnes ; qu’elle le tint dans ses bras, et l’arrosât de ses larmes, c’était pour lui la ré-

  1. Le 13 juillet.