Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/158

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vrés par les Romains ; et, outre qu’il était naturellement humain, il comptait gagner par la courtoisie un homme ami des honneurs.

Bandius vint un jour le saluer : Marcellus lui demanda qui il était, quoiqu’il le connût depuis longtemps ; mais ce n’était qu’un moyen d’entrer avec lui en conversation. « Je suis Lucius Bandius, » répondit cet homme. Alors Marcellus, comme rempli de joie et de surprise : « Hé quoi ! serais-tu ce Bandius dont on parle tant à Rome, qui a si bien combattu à Cannes, le seul qui n’abandonna point le consul Paul Émile, mais lui fit un rempart de son corps, et reçut la plupart des coups portés à son chef ! — Oui, » dit Bandius ; et, comme il lui montrait les cicatrices de ses blessures, le général reprit : « Quoi ! tu portes sur ton corps de telles preuves de ton amitié pour nous, et tu n’es pas venu sur-le-champ ! Crois-tu que nous ne saurions point récompenser dans nos amis la vaillance, quand elle est honorée même dans des ennemis ? » Après lui avoir adressé un compliment, il lui présenta la main, et lui fit don d’un cheval de bataille et de cinq cents drachmes d’argent[1].

Depuis ce moment Bandius fut toujours dévoué à la personne de Marcellus, toujours prêt à combattre à ses côtés, ardent à dénoncer et à poursuivre ceux du parti opposé. Ils étaient nombreux, et ils avaient formé le complot de piller les bagages des Romains, lorsque ceux-ci feraient une sortie contre l’ennemi. C’est pourquoi Marcellus rangea ses troupes à l’intérieur de la ville, près des portes, y fit arrêter ses bagages ; et défense fut faite aux habitants de Nola de s’approcher des murailles. Annibal, voyant les remparts sans défenseurs, laissa se débander ses soldats en approchant des murs ; car il croyait la ville sens dessus dessous. Dans ce moment, Marcellus fit ou-

  1. Environ quatre cent cinquante francs de notre monnaie.