Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/338

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

toujours le même dans nos mœurs, tandis que la fortune ne demeure pas constamment la même, et que, dans ses continuelles vicissitudes, elle appelle, par de nouvelles espérances, à de nouvelles entreprises ceux que pousse contre nous une haine invétérée.

Au reste, les événements ultérieurs servirent davantage encore à la décharge, si je puis dire, de Titus. D’un côté, ce fut un Aristonicus, fils d’un joueur de lyre, qui remplit, pour les intérêts d’Eumène, l’Asie de séditions et de guerres. D’un autre côté, ce fut Mithridate qu’on vit, après les victoires de Sylla et de Fimbria, après la destruction de tant de généraux et de tant d’armées, se relever de ses désastres, plus puissant que jamais, et lutter contre Lucullus par terre et par mer. Annibal n’était pas plus abattu que ne le fut Caïus Marius : il avait pour ami un roi puissant qui fournissait abondamment à son entretien ; il s’occupait habituellement de l’organisation de la flotte et de la cavalerie du roi, et de la discipline de ses troupes de pied. Marius, errant et mendiant dans l’Afrique, n’inspirait aux Romains que du mépris : encore quelques jours, et égorgés, battus de verges dans Rome même, ils se prosternaient devant lui : tant le présent, dans cette vie, n’est jamais ni grand ni petit par rapport à l’avenir ! tant les vicissitudes de l’homme n’ont d’autre terme que la fin même de sa vie ! Aussi quelques-uns assurent-ils que Titus, en cette affaire, n’agit point de sa seule autorité, qu’il fut député à Prusias avec Lucius Scipion, et que cette ambassade n’avait d’autre objet que la mort d’Annibal.

Comme l’histoire ne nous offre, depuis cette époque, aucune action mémorable de Titus, soit guerrière ou politique, et que sa fin d’ailleurs fut naturelle et paisible, il ne nous reste plus qu’à le comparer avec Philopœmen.