Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/487

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avait été autrefois amoureux d’Agésilas, lui conseilla de revendiquer la royauté, comme légitime descendant d’Hercule. En effet, on soupçonnait Léotychidas d’être fils d’Alcibiade, qui avait eu un commerce secret avec Timée, femme d’Agis, durant le temps d’exil qu’il avait passé à Sparte. Agis ayant jugé, dit-on, par l’époque de la grossesse, que l’enfant n’était pas de lui, n’avait témoigné aucune affection à Léotychidas ; il montra même ouvertement, jusqu’à la fin de sa vie, qu’il ne l’avouait pas pour son fils. Dans sa dernière maladie, il se fit portera Héréa[1] ; et là, sur le point de mourir, pressé d’un côté par le jeune homme, vaincu de l’autre par les instances de ses amis, il déclara, en présence de plusieurs témoins, qu’il reconnaissait Léotychidas pour son fils, et il mourut après avoir prié tous ceux qui étaient présents d’attester le fait devant les Lacédémoniens. Ils en portèrent donc le témoignage en faveur de Léotychidas. Agésilas, guerrier d’ailleurs couvert de gloire, et soutenu par le crédit de Lysandre, se vit presque rejeté, lorsque Diopithès, homme versé dans la science des oracles, cita la prédiction suivante, en l’appliquant à Agésilas, qui était boiteux :

Prends garde, Sparte, malgré l’orgueil qui remplit ton âme,
Qu’une royauté boiteuse ne fasse trébucher la ferme allure.
Des malheurs imprévue le tiendront longtemps sous le joug,
Et tu rouleras ballottée par le flot de la guerre meurtrière.

Une foule de Spartiates, entraînés par cet oracle, penchaient pour Léotychidas. Mais Lysandre représenta que Diopithès ne prenait pas le vrai sens de la prédiction : « Le dieu, dit-il, ne répugne pas à ce qu’un boiteux règne à Lacédémone ; il donne seulement à entendre

  1. Ville d’Arcadie. Selon Xénophon, il tomba malade à Héréa, et mourut à Lacédémone.