Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/245

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SERTORIUS.


(De l’an 130 environ, à l’an 73 avant J.-C.)

Il n’y a pas peut-être à s’émerveiller qu’au milieu des perpétuelles vicissitudes de la Fortune dans une suite infinie de siècles, le hasard amène souvent des accidents semblables. Car, ou le nombre des événements qui peuvent avoir lieu n’est pas fixe, et alors la fortune dispose d’une matière féconde, qui lui fournit, sans s’épuiser jamais, des effets qui se ressemblent ; ou bien les choses humaines sont circonscrites dans certains nombres déterminés, et alors ces effets doivent se répéter souvent, puisqu’ils sont produits par les mêmes causes. Il est des personnes qui aiment ces rapprochements, et qui font recueil de ces cas fortuits, qu’elles ont vus ou dont elles ont entendu parler, et qu’on croirait l’ouvrage du raisonnement ou de la prévoyance. Ainsi les deux Attys, personnages d’illustre naissance, l’un Syrien, l’autre Arcadien, furent tués tous deux par un sanglier. Les deux Actéon furent mis en pièces, l’un par ses chiens et l’autre par des hommes dont il était aimé[1]. Des deux Scipion, le premier vainquit les Carthaginois, et le second les détruisit pour jamais. Ilion fut prise la première fois par Hercule, à cause des cavales que lui avait promises Laomédon ; la seconde fois par Agamemnon, à la faveur

  1. Tout le monde connaît l’histoire ou la fable du premier Actéon ; le second fut mis en pièces par les Bacchiades ou descendants de Bacchis, fils d’Hercule, qui régnaient à Corinthe.