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CIMON.

pour demander du secours. C’est lui qu’Aristophane représente, dans la comédie[1], assis devant les autels, tout pâle, vêtu de pourpre et sollicitant une armée. Éphialte s’y opposait, protestant qu’on ne devait pas les secourir, et relever une ville rivale d’Athènes ; qu’il fallait la laisser ensevelie sous ses ruines, et fouler aux pieds l’orgueil de Sparte. Mais Cimon, au rapport de Critias, préférant l’intérêt des Lacédémoniens à l’agrandissement de sa patrie, détermina le peuple à leur venir en aide, et sortit avec un corps nombreux de troupes. Ion rapporte le mot de Cimon qui fit particulièrement impression sur les Athéniens : « Ne laissons pas, aurait-il dit, la Grèce devenir boiteuse, et n’ôtons pas à Athènes un contre-poids nécessaire. »

Après avoir secouru les Lacédémoniens, il s’en retourna par Corinthe avec son armée. Lachartus lui fit de vifs reproches de ce qu’il y avait fait entrer ses troupes avant de s’être entendu avec les habitants : « Lorsqu’on frappe à la porte d’autrui, disait-il, on n’entre pas que le maître ne l’ait ordonné. — Mais vous, Lachartus, répondit Cimon, vous n’avez pas frappé aux portes de Cléones et de Mégare : vous les avez brisées, et vous êtes entré de force dans ces villes, les armes à la main, convaincu sans doute que tout est ouvert à qui est le plus fort. » Ce ton de fermeté imposa à propos au général corinthien, et Cimon poursuivit sa marche.

Les Lacédémoniens appelèrent une seconde fois les Athéniens contre les Messéniens et les Hilotes, qui occupaient Ithome[2]. Mais, quand les Athéniens furent arrivés, les Spartiates craignirent leur audace et leur ardeur ; et, sous prétexte qu’ils tramaient quelque nouveauté, ils les renvoyèrent seuls de tous les alliés. Les

  1. Voyez Lysistrata, vers 1140.
  2. Ithome était une ville de la Thessalie, dans l’Estiotide.